baptêmes et...( Fe)

Les événements s’étaient précipités à toute allure. D’abord, accrochée à son Preston, Angel avait suivi un Michael débordant de fierté paternelle. Comme elle l’avait supposé, les entités qui hantaient les esprits des autres s’enfuirent sous les cris de Désirée.
Ce qu’elle n’avait pas prévu c’est que ces « démons » sauteraient sur le seul humain à l’abri de l’enfant. Le pauvre Nielsen en fit les frais. Quand Opal revint, en pleurs, annoncer que Justin et Erik étaient en bas, le cerveau de la Serdaigle ne mit pas longtemps à capter la solution idéale : descendre avec le bébé.
Cela fonctionna parfaitement une fois qu’un De Brent déchaîné eut ôté les protections de cire des oreilles du Suédois.
Il fallait remonter, et d’urgence. Puisqu’ils devaient emporter très rapidement quelques effets personnels, Angel se plia abandonnant Désirée aux mains d’une Bikita gloussante de joie. Que prendre ? De quoi se vêtir, se laver devrait suffire, les potions de sa mère aussi.
La découverte des canots ne la surprit qu’à demi : strictement rien de comparable à ceux du Titanic. Une bâche se tendit au-dessus des passagers qui s’installèrent sur des sièges tout confort. L’intérieur des embarcations était couvert d’une mousse antichoc qui créait une sorte de cocon douillet où tous étaient à l’aise. Pas besoin de réclamer la protection de celui que son cœur avait choisi. Le temps se suspendit dans le regard échangé. Naufrage, angoisses, tout tracas s’évanouit dans l’intensité du moment.

Je t'aime, petite sorcière!

Elle n’en demandait pas plus. Le baiser échangé la fit frissonner intensément. Ce n’était ni le lieu ni le moment des grands serments ou démonstrations. Dorlotée dans les bras aimants, le sommeil gagna la jeune fille épuisée d’émotions diverses.

On accoste au paradis, mon ange...avec le pot qu'on a il y aura un Club Med au détour de la plage!

Il en avait de bonnes, Preston. Le groupe débarqua ; un semblant d’organisation s’instaura. Michael, Manu et Justin inspecteraient les alentours tandis que les autres monteraient le campement.
Angel avait la débrouillardise chevillée au corps. La magie en ce lieu semblait de possibilité très réduite… et alors ? Son enfance à la campagne l’avait endurcie aux travaux manuels. Désirait-elle épater davantage son journaliste préféré ? Toujours est-il qu’elle voulut escalader des rochers où sûrement des oiseaux nichaient. Elle s’imaginait en train de battre l’omelette du siècle lorsque son pied dévissa. Outch ! Une entorse ! Manquait que ça. Soutenue par son chevalier servant auprès d’une Mrs Green attentive, sa cheville reprit rapidement des proportions normales. Evidemment, n’étant pas idiote, Dess tenta de soutirer des informations sur ce qui était advenu sur le bateau.

*Motus et bouche cousue. Pas la peine de gâcher sa mémoire avec des souvenirs douloureux*

Amenée à l’ombre, bercée dans de tendres bras, Angel se sentait fondre, et la température extérieure n’y était pour rien. Les propos de Preston mettaient du baume sur son esprit torturé. Benji lui avait offert un cadeau somptueux en s’écartant de son chemin. La voie était tracée pour elle. Entendre le journalise qui filmait déclarer sans ambages ni gêne : Ça fera des beaux souvenirs pour nos enfants! Si on leur raconte ça...ils nous prendront pour des fous! Lui prouva qu’ils étaient de connivence totale.
Comment une telle communion avait-elle pu s’établir entre deux êtres que tout opposait au départ ? Ils n’étaient pas du même monde quoiqu’Angel en connût sur les moldus plus que lui sur les sorciers. Son père avait-il été séduit par sa mère de la même manière ? Jamais elle n’avait osé leur demander comment ils s’étaient connus et pourquoi ils s’étaient choisis. De retour en Angleterre, elle leur poserait cette question si jamais ils s’opposaient à ses projets. Elle savait qu’ils n’en feraient rien. Mr Grisham adorerait son futur gendre, même s’il serait surpris du changement.
Tout en rêvant à l’avenir, l’heure du repas sonna. Ce fut un fameux spectacle de voir Bryan se débrouiller avec Tsunami qui mangea finalement son plat.
Plusieurs tentes avaient été dressées pour la nuit. L’après-midi s’était écoulée sans heurts, Angel avait même nagé sous l’œil vigilant de Preston. Les requins ne la crurent pas assez bonne pour eux. Bain fini, elle put s’allonger sur une serviette partagée avec son aimé et lui murmurer de tendres aveux :

Notre rencontre a été si… confuse (elle rit) je crois t’avoir aimé dès ce premier baiser. Je me croyais folle d’imaginer que tu pourrais répondre à cette attirance qui nous poussait l’un vers l’autre. Je t’aime Preston. Je souhaite passer ma vie à tes côtés.

Tendresse ineffable que ces instants délicieux où deux âmes communient. La sagesse les empêcha de poursuivre trop profondément leurs explorations personnelles.
Emotionnée par les caresses du journaliste, Angel revint à des considérations plus terre à terre teintées de regrets :

Je suppose que… que tu vas prendre tes quartiers de nuit sous la grande tente avec Leroy et Yann. C’est mieux ainsi, je crois.

Nouveaux baisers et câlins, ils savaient que tout viendrait à son heure.
Au dîner : surprise ! Opal et Erik officialisèrent leur union sous la gouverne d’un Manu très grave qui rappela aux jeunes époux ce qu’impliquait le mariage. Ils dirent amen à tout, on signa le registre sauvé des eaux et on trinqua à la santé des nouveaux mariés. Le canot de survie façon Davenport comportait, outre nourriture et matériel, du Champagne ainsi que d’autres boissons plus fortes.
La soirée s’avança dans la bonne humeur. Un grand feu fut allumé, tous jouirent de la flambée.
Il fallut bientôt regagner ses pénates. Après un baiser étourdissant, Angel et Preston se résignèrent à s’éloigner. Des tours de garde au coin du feu avaient été établis ; ils ne feraient pas partie du même.
Rêveries, images futures, la jeune fille finit par s’endormir du sommeil du juste.
Pas pour longtemps…
Arrachée à ses songes d’une poigne vigoureuse, elle fut traînée dehors par les cheveux et jetée près du bûcher tel du linge sale. Les idées à l’envers, elle ne comprit rien. Dos à dos, ficelés proprement, plusieurs couples bâillonnés se débattaient dans leurs liens. Des enfants pleuraient… un vrai cauchemar… éveillé. Elle aussi eut droit au coton dans la bouche et bandeau dessus.
Désespérée, elle chercha Yates de ses yeux affolés. Il gisait sur le côté, lèvre fendue, juste près de Manu Leroy étendu avec une plaie au crâne. Justin et Michael, entravés, réduits au mutisme, ruaient dans les brancards sous le rire gras d’une bande d’une dizaine d’individus.

Qu’ils sont beaux nos pigeons ! s’esclaffa l’un d’eux. On n’a eu qu’à les cueillir comme du gentil bétail. Vu les barques, c’est du nanan. Les rançons seront à la hauteur, pour une fois !

Cris de joie, tirs en l’air, saluèrent cette tirade. Déjà les provisions étaient pillées ; plusieurs s’enivraient.
Un grand barbu, pas très propre, inspecta la cargaison de captifs.

Faut qu’ils fassent cracher les familles au bassinet. Qui prenons-nous en intermédiaire ? J’aime beaucoup la tite blonde ; celle qui a les seins gonflés. J’parie que pour son mioche, elle donnerait ses yeux.

De Brent s’arqua, défenseur. Il reçut une baffe à lui arracher la tête.

Tiens-toi tranquille ou tu y passes. Prends le môme, Al ! On va rire.

*Désirée ? Non, non !*

La fillette, étrangement calme, passa de main en main pour atterrir dans les pattes de l’hirsute qui la démaillota. La suspendant par une cheville, il s’approcha du bûcher :

M’dame, ceci est à vous, non ? Je compte jusqu’à trois avant de lâcher. Dites-nous où est le fric et vos adresses. Un… deux…

Vic craqua. Jamais Angel n’avait vu quelqu’un d’aussi épouvanté. On libéra sa bouche ; Mrs De Brent put s’exprimer en pleurant ce qui amusa la galerie.

Pas si vite, m’dame. Pete, tu es le seul à savoir écrire, vas-y.

Ledit Pete, s’arma d’un stylo et d’un carnet notant tout ce que débitait Mrs De Brent en grand émoi.
Miss Grisham observa la scène sans s’insurger.

*Des pirates… Ils ne veulent que de l’argent… Où sont les elfes… Apache ?*

Elle eut beau les chercher du regard, elle ne les aperçut pas ce qui lui redonna le moral.

*Ils se sont planqués… Ils veillent quelque part. Dès que ces malfrats auront le dos tourné, ils danseront sur un autre air.*

Peut-être fallait-il une diversion pour qu’ils interviennent au plus tôt ? Voir Preston inconscient lui retournait les sangs. Vic parlait, l’autre transcrivait. On verrait ce que ça donnerait. Se laissant glisser sur le côté, Angel simula une attaque d’épilepsie. Corps agité, yeux révulsés, elle ne put cependant pas relâcher ses sphincters. Le tableau fut suffisamment éloquent pour alarmer les pirates qui s’interrogèrent…

Mesdames Messieurs, tous à bord!!! Naufrage de 1ère.classe pour les amis!!!

*Pas à dire, la classe!...*

C'était du délire pur, mais sans perdre le calme...celui là on l'avait paumé il y a un bon moment, tout le monde se vit accommodé à bord d'un superbe canot de sauvetage où, vu les circonstances, on ne manquait de rien. En vue des évènements qui avaient précédé, Opal jugea de bon ton se placer, elle et Erik, le plus loin possible des Davenport. Après tout son chéri, même sans en être conscient, venait d'envoyer le super voilier au fin fond de l'océan...pas de quoi sauter de joie!

*Et dire que mes frères pensent que je suis catastrophique...Ah, toi, mon amour...quel ajout au palmarès familial!*

Quand son prince chéri avait récupéré la conscience, il était perclus de remords...et de douleur. Michael n'y était pas allé de main morte et l'avait gentiment démoli. Mais enfin c'était pour une bonne cause.

Je… Je sais que c’est de ma faute… Je ne voulais pas… Je t’aime.

Mais non voyons, mon amour...tu n'y étais pour rien...tout le monde le sait. Je t'adore, moi aussi...allez, essaye de dormir.

À moitié rassuré, il s'était laissé dorloter et avait fini par céder au sommeil et la fatigue...pas pour longtemps.

Justin se réveillait. Elle craignit, pas sans raison, un règlement de comptes en beauté mais Justin avait le don ineffable de tous les surprendre...au lieu d'envoyer Erik aux Calendes...ou pire...il le remerciait de s'être défait de ce bateau dont il en avait un peu marre.

*Comme quoi, ça tourne pas rond chez tout le monde!*

Mais tout est bien qui finit bien. Tout le monde en paix, tout le monde content. On put dormir sans autre souci...et même pas trop, de lendemains incertains.

Au matin suivant, on arrivait à destination...

*Wow...dans les films ça tarde un peu plus!*

À peine ouvert l'œil, les déclarations d'Erik la prirent de court...et la plongèrent dans un océan de ravissements intenses:

Nous allons accoster ma chérie. Je ne sais pas de quoi demain sera fait… aussi, épouse-moi, vite, je t’en prie.

Il ne lui fallut pas plus de cinq secondes pour soupeser les pour et le contre. Sa famille pousserait des hauts cris...mais les circonstances n'étaient pas aux chichis:

Oui. Je veux...demain pourra être fait de ce qu'il voudra, si tu es avec moi...ce sera toujours un bout de ciel!

C'est ainsi...qu'Erik Nielsen, prince Aegir et Opal McLane, demoiselle de Kelamera, unirent leurs destinées après une rude journée de travail pour établir un campement. Ils échangèrent leurs vœux sous les étoiles et le regard ému de leurs compagnons de naufrage. C'était parfait...que demander de plus?...

*Un peu de paix, n'aurait pas été une méchante idée!*

Opal venait d'être tirée de son paisible sommeil par une série de bruits étranges. Des cris...des voix inconnues...Leur tente était la plus éloignée de toutes, gentil détail de la part des autres pour leur nuit de noces...Elle pointa le nez par l'ouverture et le spectacle qui s'offrit à ses yeux à la lumière feu...la terrifia.

Erik...Erik...lève toi...on fiche le camp...des pi...pirates attaquent!

Il dut la prendre pour une folle mais déjà l'australienne s'habillait à toute vitesse, prenait son sac, véritable grotte d'Ali Baba, sortait une carabine de chasse de sous la litière et l'entrainait vers la forêt toute proche. Au campement régnait la folie, surpris dans leur sommeil, tous les passager du Broken Heart étaient à présent en main d'un groupe de sales types à la mine pas commode, qui n'avaient rien de semblable à des bonnes intentions.

Regarde moi ça...Pauvre Preston...et oups, le curé, ils lui ont fendu le crâne comme un pastèque. C'étaient eux qui montaient la garde...Mince...Michael et Justin vont faire un malheur...

Ce fut terrible d'assister aux outrages que les prisonniers eurent à subir, sans rien pouvoir faire pour le moment. Les pirates étaient bien armés et étaient au moins une dizaine. Entendre les cris des enfants affolés leur brisait le cœur...voir les autres, ligotés, à la merci de ces brutes sans cœur, leur révulsait les entrailles...mais le pire fut quand ils s'en prirent à la petite Désirée, s'en servant pour tirer à un Vic défaillante de terreur toute classe d'information pour...

Demander une rançon!...Misérables...si Michael, le pauvre, leur met le grappin dessus, je ne donne pas un sou pour leurs peaux...on doit faire quelque chose, Erik...

À deux contre le monde? Facile à dire. Un instant plus tard, la jeune Mrs. Nielsen, princesse Aegir, vit le salut se pointer...ça avait des oreilles pointues et des yeux globuleux, ça couinait doucement, l'air effaré.

Bénis soient les dieux...Bikita...Briman...

Et deux autres plus Apache.

Magnifique...on a déjà une petite armée!, souffla t'elle en leur faisant signe de se grouper autour d'elle et son mari, c'est merveilleux que vous ayez réussi à vous sauver...on est leur dernier espoir.

Vie au grand air et chasse au sanglier, vous donnent une idée plus ample sur ce que veut dire...traquer la proie! Il faudrait déployer des trésors de génie pour libérer les sorciers. Opaline avait la tête pleine d'idées et le sac, de surprises. Son mari l'écoutait, sans doute un peu surpris de voir sa petite femme si imbue de son rôle de chef de guerre...une nouvelle facette en rien négligeable vu les évènements.

Bikita et Briman...vous vous glissez derrière Justin et Michael et coupez leurs liens...voilà, avec ce couteau suisse ça devrait suffire...puis faites de même avec les autres.

Merci McGyver. Couteau en main, les deux elfes s'en furent accomplir leur mission. Le deux autres se virent expédiés faire exploser des pétards de l'autre côté du campement une fois qu'elle donnerait le signal...

J'ulule comme une chouette, vous voyez le genre!

Ils voyaient rien du tout, un peu bornés, ces elfes! Fallut passer à la démonstration, tant pis s'il n'y avait pas des chouettes dans le coin mais elle se doutait bien que ces brutes n'étaient pas ornithologues à leurs moments de loisir. La distraction donnerait le temps pour que les hommes entrent en lice.

*Ça va péter joliment...j'adore ces jumeaux Weasley!!!*

Quant à toi, ma belle...toi, tu vas t'en donner à cœur joie en aidant ton maître...tu peux en bouffer un si a te dit! Fous leur la trouille de leur vie...mais surtout te fais pas farcir de plomb!!!

Elle caressa le pelage doré du cougouar qui semblait très bien comprendre ce qu'on attendait d'elle.

Mais on va attendre le bon moment. Toi, mon chéri...tu te sers de ça!

Opal planta la carabine de chasse dans les mains de son chéri et lui fourra les poche de cartouches...pour exhiber par la suite son boomerang adoré.

Les deux elfes accomplissaient leur mission avec toute l'efficacité voulue. Ils virent Davenport et De Brent se défaire de leurs liens, alors qu'Angel...faisait une crise épileptique en toutes règles.

*En voilà une qui a raté sa vocation!*

Deux ululements bien modulés...acte suivi, la deuxième édition de la bataille d'Iwo Jima se déclencha de l'autre côté. Réaction espérée...la pagaille!

Opal, inspira et lança son arme aborigène. Vibrant dans l'air nocturne, le boomerang décrivit une courbe élégante, descendit pour atteindre sa cible qui s'effondra comme une masse, s'éleva de nouveau et se perdit, mystérieux, dans l'ombre...pour revenir dans sa main. Les pirates n'avaient pas la moindre idée de se qui se passait...à moitié ivres et affolés, quelque chose de très semblable à la terreur les paralysa quand, jaillissant de la forêt en deux bonds prodigieux, un énorme félin aux crocs étincelants sauta à la gorge de l'un d'eux...

Un cri délirant et sauvage retentit dans la palmeraie...cri de guerre venu de la nuit des temps...comme quoi, les aborigènes quand ça veut, ça en fait du beau boucan!

Un si grand bonheur ! Vraiment Vic se crut au paradis. Jamais Michael ne s’était comporté de la sorte. Pas qu’il soit brutal d’ordinaire, mais la tendresse inédite dont il l’entourait, la patience ineffable démontrée avec les enfants, la décontenançaient légèrement. Elle ne s’en plaindrait pas, loin de là. Elle en avait assez bavé avec ce De Brent aux sombres humeurs et problèmes.
Son cher époux disparut quelques heures en compagnie de Justin et Leroy. Sécuriser le périmètre n’était pas une mauvaise idée.
A l’ombre de palmiers, Victoria put pouponner en toute quiétude. Apache et Bikita surveillant Sarah et Lucas ; tout n’était que paix. La fraîche Mrs Green vint gentiment à son chevet. Elle semblait redouter une dépression post-natale dont Vic ne ressentait aucun symptôme.
Elle était heureuse, entièrement. D’ailleurs, à son retour, elle eut à nouveau droit à des attentions très particulières. Michael posa la tête sur ses genoux et elle ne put empêcher ses doigts de jouer dans la tignasse blonde :

Tu sais, ma chérie, le bonheur parfait...ça existe...j'y nage en plein!

Noyons-nous ensemble, mon amour.

Elle se pencha pour souder ses lèvres à celles de celui que, contre vents et marées, elle aimerait jusqu’à son dernier souffle.
Le midi arriva avec une chaleur d’enfer. C’est bien parce qu’il fallait qu’elle s’alimente correctement pour Désirée, sinon, la jeune mère aurait dédaigné son repas. Poussée par son époux, elle avala ses bouchées puis fut ravie d’une proposition de sieste au dehors.
Désirée, nourrie et changée, ne brouilla pas l’atmosphère de ses cris. L’après-midi était bien entamé lorsqu’elle émergea. Voir jouer époux, enfants et félin lui amenèrent des larmes d’émotions aux yeux. Elle avait tant souhaité vivre des moments comme ça !

*Puissent ces heures s’éterniser*

La soirée démarra avec un nouveau mariage ! Là… Vic fut saisie comme la plupart du groupe. Mais elle pouvait comprendre ce qui poussait ces jeunes gens à s’unir ouvertement. Peur de l’avenir incertain, désir de s’affirmer… Tous se réjouirent pour eux. Le Champagne coula ; Davenport était un commandant de bord très prévoyant. Bien sûr Vic se contenta de limonade mais participa à l’ambiance générale. La fatigue resurgit après le nourrissage du bébé. Peut-être son lait n’était-il pas assez riche ? Il lui semblait que l’enfant était nerveuse. Des idées saugrenues, sans doute. Pourtant, son apaisement total n’accompagna pas Vic dans ses rêves nocturnes. Une angoisse indéterminée la rongeait. Des images folles l’agitèrent. Michael gisait dans une mare de sang ; Désirée était brûlée vive… Etait-ce un cri ? Un bruit ? Quelque chose la tira du sommeil très brutalement. Tout bascula.
Combien étaient ces hommes, elle ne chercha pas le décompte. Ce qu’ils firent faillit la faire vomir et s‘étouffer dans son bâillon. Ils osaient, ces lâches, s’en prendre à la chair de sa chair. Voir sa fille soumise au bûcher la révulsa. Ils voulaient des noms, des adresses, du fric. Ils auraient tout, absolument tout s’ils laissaient Désirée tranquille. Le déballage de ses connaissances, quasi automatique, surprit les bandits. On lui intima de freiner son débit puis…

*Angel est épileptique ? *

Le cas lui parut douteux ; elle n’osa pas arrêter son énumération, ce fut un soufflet en travers de la bouche qui s’en chargea :

Ta g***** !

Muette, la jeune mère assista à un curieux ballet. Toute leur attention requise par les contorsions d’Angel, nul – sinon elle – ne vit Briman et Bikita couper les liens de Justin et son Michael :

*Venge-nous ! Montre leur que…*

Sortie de l’ombre, Apache jaillit, ses crocs se refermant sur une gorge avinée. Quelque chose frappa un des bandits avant que des hurlements rageurs n’éclatent dans la nuit.

Casse-lui la figure, Michael ! encouragea-t-elle son époux déchaîné.

Elle voulait sa fille. Ses mains libérées par Merlin sait qui, elle rampa jusqu’à l’enfant couchée sur le sable, l’attrapa et la recueillit contre sa poitrine. Où étaient les autres enfants ? Leurs pleurs la guidèrent.

Tout doux mes agneaux. Papa fait fuir les vilains. Je suis là mes amours, chut !

Pas facile de tenir un nourrisson et deux mômes terrifiés. Dess avait récolté les siens. Unies par la force des choses, les deux jeunes femmes écartèrent leur progéniture du ring improvisé. En d’autres circonstances, Vic aurait peut-être applaudi les prestations des uns et des autres, là…

MICHAEL, NON !

Son mari serrait si fort le gosier d’un malfrat qu’elle craignit le pire. Preston et Manu, réveillés, ne demeuraient pas en reste. Bryan fut… fracassant tandis que le jeune Nielsen tira soudain en l’air.
Quelques baffes s’échangèrent encore avant qu’un calme apparent s’établisse.
Une étreinte à couper le souffle suffoqua Vic :

On va bien, on n’a rien. Et toi, toi ? Tu vas bien ?

Le moment était au bilan…

Pas de doute. Ils avaient accosté dans un coin de paradis. L'endroit était, à simple vue, parfait. De nature peu difficile, Nate n'avait aucun mal à s'adapter à de nouvelles situations. Tant que Viviane et Justin seraient à ses côtés peu lui importait où et comment.

À peine débarqués, on avait procédé à l'installation de tout ce beau monde de la meilleure façon possible. Il faut dire que ce n'étaient pas les moyens qui manquaient. Son Justin, splendide comme toujours, avait si bien prévu l'imprévisible, que même au milieu de la catastrophe tout frôlait la perfection.
Pendant que son mari accompagné de son inséparable Michael et du prêtre polynésien exploraient les alentours pour garantir leur sécurité, les autres s'attelaient à la tâche d'installer un campement.

Découvrir que la magie était quasi inopérante les laissa tous un peu perplexes. Sorciers peu habitués à faire quoi que ce soit avec l'aide de leurs baguettes, il fallut déployer patience, génie et énergie pour venir à bout du travail...à main nue. Aucun ne s'en plaignit. Nate moins que personne. Grandie dans un milieu nettement moldu, se servir de ses mains ne lui posait aucun problème...ou presque. Comme pour tous, l'enthousiasme fut plus grand que l'habileté et vers midi, plus d'un se plaignait de courbatures, cloques, entailles ou coup de soleil, rien de grave...simple retour à la réalité de la vie sans magie.
Charlie , par exemple était d'un dynamisme indéniable , mais citadine jusqu'au bout des ongles, était parfaitement inutile au moment de faire quoi que ce soit de plus compliqué que servir un verre de limonade. Par contre son mari, était apte pour tout travail. Dess préféra ouvrir une espèce de cabinet médical et soigna à longueur de journée des bobos divers. Bryan s'adonna à des tâches plus rudes et s'en tira très honorablement. Le duo dynamique Erik-OPal s'accordant à la perfection abattaient le travail de trois sans arrêter de rire et s'amuser comme des petits fous. Angel et son journaliste, coulaient le parfait amour en faisant gentiment leur boulot, sans pratiquement se quitter des yeux. Nate s'occupait de faire garnir les diverses tentes, secondée efficacement par Briman. Vic, bien installée à l'ombre savourait les bonheurs de la maternité...et celui de voir son beau Michael plus amoureux que jamais. Sous l'attentive vigilance de Bikita et un des elfes de Dess, les enfants jouaient sur le sable...avec les inévitables accrochages entre Tsunami et Sarah. Apache, paisible se laissait cajoler interminablement par Lucas et Fuji...

Le retour des explorateurs avec la nouvelle que les alentours étaient inhabités réjouit tout le monde, un repas copieux, sans être somptueux fut servi pour le bonheur de tous, cette matinée de dur travail leur avait ouvert l'appétit!
Une petite sieste s'imposait pour passer à l'ombre les heures de plus forte chaleur. Justin s'occupa d'installer lui même un grand hamac, à l'ombre bruissante des palmiers, face à une mer invitante. Viviane dormait, sage comme un ange, dans son couffin. Ils purent s'isoler un moment, sans aucun souci. Nate n'était que plus heureuse...après tous ces soubresauts, se retrouver en paix, dans les bras de son mari, tenait du rêve.

Ce soir, Opal et Erik se marièrent. Ils étaient si jeunes, si heureux, si sûrs de leur amour. Tous les présents en étaient émus et l'évènement fut dûment fêté. La soirée était au romance et au bonheur. Tout était parfait...

Le réveil, si brusque fut un cauchemar...Sans rien comprendre à ce qu'il se passait Nate fut tirée de la tente avec une brutalité inconcevable. Hurlant et se debattant, elle voulut prendre Vivane mais on la traina, comme prise de guerre, vers le feu, autour duquel étaient déjà réunis les autres...plus ou moins mal en point. Bâillonnée et ligotée, cherchant d'un regard fou d'angoisse son mari, elle le vit enfin, à moitié assommé, attaché près d'un Michael dans le même état. Charlie donnait du fil à retordre à ses capteurs qui finirent par l'assommer carrément pour la laisser choir comme un fardeau prés de son mari hagard et impuissant de l'aider. Bryan eut droit à sa ration de brutalité quand il essaya de défendre sa Dess. Non loin d'eux, gisaient Manu et Preston, immobiles...elle craignit le pire. La dernière a être amenée fut Angel...aussi affolée que tout le monde.

Mais le pire étaient ces hommes. Ceux qui leur étaient tombés dessus sans préavis et qui semblaient être d'une sauvagerie brutale et assoiffée de Dieu sait quelles horreurs. Entendre leurs propos, leurs commentaires grivois en détaillant une à une les femmes à leur merci, lui laissa pressentir les choses les plus terribles. Leur choix s'arrêta sur Victoria...Nate crut que Michael allait devenir fou...surtout quand un de ces misérables s'empara de Désirée...

*Mon Dieu...non...pas ça!!!! Pas ça...*

De la terreur pure. Ils vivaient leur pire cauchemar...mais la cavalerie vint à la rescousse. Sans savoir comment, Nate sentit que ses liens cédaient. Les pirates, pas de doute qu'ils l'étaient, se trouvaient à cet instant, distraits par Angel qui convulsait atrocement, feignant, de maitresse façon une crise d'épilepsie...et une série d'explosions du côté de la plage, à croire que la Marine débarquait!
Les elfes. Elle avait oublié les elfes. Ils étaient là, se portant au secours de leur maîtres...Libérés, Justin et Michael bondirent, mûs par le même ressort et se ruèrent sur les attaquants, pris de court.
Nate aurait voulu prêter main forte dans la mêlée mais sa seule et unique préoccupation était sa précieuse Viviane...elle courut, vola presque jusqu'à la tente. Son petit ange adoré, dormait placidement dans son couffin, étrangère à l'horreur de cette nuit. Nate la prit et la serra contre son cœur en pleurant avant de prendre son courage à deux mains et quitter la tente. Les autres enfants étaient réunis non loin de là, Victoria et Dess s'y trouvaient déjà. Elle leur confia Viviane.

Je vais donner un coup de main aux garçons!, assura t'elle en s'armant d'un gros bout de bois, à manière de gourdin, ça va faire du bien fracasser quelques crânes!

L'esprit maori ne meurt pas!

Et c'est avec une joie féroce qu'elle abattit son gourdin sur le premier grossier personnage qui croisa son chemin. Telle une furie échevelée, elle se fraya passage vers Justin, aux prises avec un grand pirate armé d'un coutelas énorme. Sans le penser deux fois, elle assena un coup qui fit craquer des os.

Je ne supporte pas de voir qu'on te saute dessus!

Plus loin, Michael réglait son compte à l'homme qui avait osé poser sa main sur Victoria... Nate épouvantée, le vit lui briser le cou sans même tiquer avant de se diriger, armé du couteau du vaincu, vers celui qui avait tenu sa fille au dessus du bucher. Nate ouvrit la bouche pour hurler mais Justin, soudain très serein, la retint contre lui. Il savait sciemment que rien ni personne n'arrêterait son ami dans sa vengeance.

Soumettre les pirates restants, déjà assez épouvantés par la tournure que prenait leur attaque surprise, ne demanda qu'un déploiement moindre de forces. Nate donna un ou deux coups de gourdin supplémentaires. Vit Charlie lancer un uppercut fulminant à un type deux fois plus grand qu'elle, alors que Robert démolissait à coups de poing celui qui l'avait frappée. Opal s'en donnait à cœur joie avec son boomerang. Manu sur pied, oubliait quelque peu son investiture sacerdotale et répartissait sans arrière pensée des mesures correctives à droite et à gauche. Preston lui, ne s'en tirait pas mal du tout. La fin de la bataille sonna quand Erik tira un coup de feu en l'air...les faisant revenir tous à un semblant de bon sens.

Sans lâcher Justin, Nate, qui tremblait des pieds à la tête, rejoignit ses amis.
Ils étaient tous là, plus ou moins amochés mais parfaitement vivants. On ne pouvait pas dire la même chose des pirates...

Les trois qui restaient encore sur pied, de justesse, furent fortement ligotés et attachés à un palmier. D'autres, entre eux ceux qu'elle avait si efficacement assommés, furent examinés par Dess et Charlie, qui décidèrent qu'ils ne couraient pas de danger de mort , furent, aussi attachés, mesure préventive. Pour les trois restants il n'y avait rien à faire, l'un avait le cou brisé, l'autre un coup de couteau en plein cœur et le dernier n'avait pas survécu à l'attaque féroce d'Apache.

On déblaya le campement de tout reste de ce malheureux épisode et on se réunit autour du feu. Briman silencieux, récupéra quelques bouteilles intactes après la tentative de pillage et servit une boisson forte à tout le monde. Nate leva son verre d'une main tremblante.

À notre chance...

Charlie gardait un souvenir confus de la soirée de son mariage. La seule chose dont elle était sûre est d'avoir flotté sur un nuage de bonheur avant que la situation ne bascule étrangement. Sans savoir comment, elle se trouva en train d'aider Victoria à mettre au monde son enfant. Ce fut une petite fille, qui pour un instant lui fit passer la pire frousse de sa vie mais dont les pleurs, soudain vigoureux avaient dissipé un incompréhensible maléfice qui semblait...on le lui raconta après, s'être emparé de tous les sorciers à bord. Robert ne voulut en dire plus et Charlie dut se conformer avec cette pauvre information...
D'autre part, la new yorkaise n'eut grand temps de se faire des soucis à ce respect..le bateau coulait! Quelle embrouille! à la quatrième vitesse, secondée de son tout nouveau mari, elle ne put que récupérer quelques affaires de première nécessité et se précipiter au canot de sauvetage...

Curieuse façon de passer sa nuit de noces! Mais se sentant trop fatiguée pour discuter, elle avait l'impression de s'être battue avec un troll, Charlie céda au sommeil, lovée dans les bras aimants de son Robert chéri.

Réveil en fanfare pour réaliser que le voyage arrivait à sa fin. Avant de pouvoir réagir, son mari la prenait dans ses bras et ils débarquaient. Charlie riait, elle était heureuse et en vie, Robert à ses côtés...ses amis n'avaient subi, non plus, dommage quelconque...donc rien de quoi se plaindre!

Établir un campement! Quoi de plus facile?...Euh! Facile quand on a la magie pour résoudre les menus problèmes ou quand on est un moldu capable de se servir utilement des ses mains...Charlie venait de Manhattan et était psychiatre, quand elle avait besoin de poser un clou suffisait d'appeler le concierge de son immeuble, si quelque chose ne marchait pas il y avait toujours un technicien pour s'en occuper. Elle ne faisait que marcher ses méninges pour découvrir ce qui clochait chez celles de ses patients..ses mains, soignées et délicates n'étaient pas faites pour tenir une pelle, ni un marteau...En résumé, Charlie était d'une inutilité parfaite même si pleine de bonne volonté. Le plus dur travail auquel on la destina, en ce jour glorieux, fut celui de repartir de la limonade fraiche entre ceux qui bossaient durement, pour lui fournir un abri digne.

Papillonnant de ci de là, elle faisait son petit bilan de la situation...fallait dire que pour des naufragés en détresse tout le monde semblait le prendre drôlement bien. Des gens parfaitement équilibrés. Michael la surprenait mais positivement, quelque chose avait changé en lui...pour une fois il avait l'air parfaitement détendu et ravi de la vie. Les petits semblaient prendre la chose avec la philosophie simple de l'enfance :Papa et Maman sont là, tout va bien!
Victoria se remettait de ses couches en plein état de totale félicité. Pas de dépression à craindre, pas tant que son blond mari demeure tel quel. Justin et Nate avec leur petite Viviane, coulaient le bonheur parfait. Charlie admirait l'humeur de Davenport, pas tout le monde ne se remet de perdre un bateau comme le sien en faisant des blagues. Erik et Opal, ceux là personnifiaient la joie de vivre et l'insouciance...la Dr. Wolff n'était pas voyante mais aurait pu leur prédire une longue vie de bonheur partagé, sans peur de se tromper. Angel aussi s'était très bien remise des sursauts de la vie à voir les regards échangés avec Yates, Charlie ne put que se féliciter d'être entourée de gens si heureux et sans problèmes. Son amie Dess, sereine et heureuse ne perdait pas de l'œil son mari qui travaillait plus loin alors qu'elle dispensait des soins à qui se présentait...et ça ne manquait pas!

Pour finir la journée en beauté, on célébra un nouveau mariage...cette fois Charlie était bien décidée à s'amuser...il y avait du champagne, de l'humour, du bonheur...

Être arrachée du sommeil par une brute qui la trainait hors de sa tente dans le meilleur style Cro-Magnon n'était l'idée que Mrs. Rockwell avait d'un réveil en douce. Elle eut un instant la stupide idée que son flambant mari était devenu soudain fou mais ne tarda pas à le voir subir un traitement similaire et pour idiot que cela paraisse, elle en fut soulagée...sait on jamais ce que peut penser un psy? La seule explication qu'elle trouva à cette épouvantable situation fut qu'ils étaient tombés entre les griffes de dangereux brigands...Ce qui ne tarda pas à se confirmer.

Bien entendu, quand on a grandi dans une ville extrême comme New York, réagir à la défensive s'impose. Charlie ne comptait pas jouer le rôle de victime passive. Elle se battit comme un chat sauvage, griffa. mordit, joua des pieds et des poings...et fut réduite sans ménagements d'un coup de poing qui l'assomma en bonne et dûe forme....ce qui donna comme résultat qu'elle rata le plus beau de l'action.

Quand elle récupéra ses esprits, sonnée et chancelante, son premier réflexe fut toutefois de se jeter dans la mêlée. La chance voulut qu'elle tombe sur une brute énorme, mais elle était si furieuse que se forces se décuplaient...à la bonne manière d'un new yorkaise avertie, Charlie lui envoya un uppercut féroce...il s'étala à ses pieds. En soufflant sur son poing endolori, elle resuma la situation:

Mâchoire de cristal!!!

Son Robert venait de mettre KO l'animal qui l'avait assommée et un coup de feu en l'air, marqua la fin de la pagaille.

Diables...il s'en est passé des belles...

Les pirates réduits, on saucissonna de belle façon les survivants. Les trois défunts attribuables au duo De Brent-Gros Minet furent rapidement enterrés à l'écart du campement et tout le monde se réunit autour du feu pour faire un bilan serré de la situation.

Avec un soupir, Charlie laissa aller sa blonde tête sur la gaillarde épaule de son mari:

Tu sais, mon chéri...je pense que je vais reprendre mes consultations...c'est de tout repos comparé à ça!

Un conseil de guerre s'imposait. La circonstance était grave. Nul ne doutait que le groupe qui était tombé sur eux n'était pas seul...il y avait beaucoup à prévoir. Pas question de songer à dormir!

Les explications de Manu Leroy avaient surpris Justin. Il le fut d’autant plus quand, sans ambages, Michael déclara ne pas connaître d’Alix. Là, Davenport commença à gamberger :

*L’exorcisme aurait-il fait fuir tous les démons… absolument tous ?*

Ce n’est certainement pas lui qui irait rappeler ses frasques à son copain, oh non ! Il avait l’air tellement… différent ! Puisque Victoria était la première bénéficiaire du changement, tout était bien.
Lui se sentait merveilleusement bien. D’accord la perte du navire était un fameux os à digérer mais l’assurance casquerait et un autre bateau naîtrait. En parlant de naissance, celle de Désirée lui donnait des idées gaillarde. Une petite partie de l’après-midi se passa chaudement auprès de Nate. Quelle perfection ! Toujours il bénirait leur rencontre très baveuse au chemin de traverse. Peut-être que leurs galipettes seraient fécondes ? Déjà il imaginait un tit gars genre Lucas ou Fuji gambader avec lui. D’autres devaient songer aussi à ce genre de chose. Yates… Jamais il n’avait vu son pote se comporter ainsi. Il ne lui connaissait pas une vie sentimentale aussi tumultueuse que Michael mais se surprenait de sa fixation sur la jeune Angel. S’ils étaient heureux, il n’avait rien à dire contre.
Au dîner, les vœux échangés entre Miss McLane et le Suédois ne l’étonnèrent pas. Il avait vu la romance se développer sous ses yeux lors d’une autre croisière. Le jeune homme était sérieux ; Justin l’appréciait beaucoup.
Après avoir fêté les nouveaux époux, les hommes restèrent auprès du feu pour régler des détails de surveillance. On tomba d’accord. Lui et Michael assumeraient le premier quart ; Preston et Manu le second puis Robert et Bryan clôtureraient. Autant laisser Nielsen tranquille pour sa nuit de noce et Kérouec ménager ses vieux os.
Discuter avec Michael au coin du feu fut un plaisir depuis pas mal de temps négligé. Justin évita soigneusement les sujets douteux mais tôt ou tard il faudrait y revenir pour réintégrer son ami au sein de la communauté sorcière sans que la moindre ombre n’entache son curriculum. Ils parlèrent des gosses, de divers projets puis décidèrent de réveiller les suivants. A peine sortaient-ils à quatre de la grande tente que le monde éclata. Sonné quelque temps par Dieu sait quoi, Davenport reprit conscience attaché au dos d’un Michael rageur. Impossible de communiquer on lui avait fourré un solide bâillon dans la bouche.

*Du calme ! se gourmanda-t-il. Ecoute, regarde. Où est Nate ? Noooon !*

Il prit sur lui de ne pas se tortiller comme un sauvage. Cela n’aurait servi qu’à animer la vindicte des autres. Sa femme était là-bas, un peu malmenée mais sauve. Preston et Manu avaient dû résister car ils étaient KO à proximité. Pas de trace du nouveau couple officiel ni des elfes. Davenport se prit à espérer qu’un revirement était possible. Puis… Michael devait devenir malade d’angoisse. Ces immondes crapules s’en prenaient à Désirée, la suspendant au-dessus des flammes obligeant Vic à déballer à toute allure tout ce qu’ils désiraient entendre. La jeune Angel, dernière victime ligotée, sembla soudain prise du haut mal.
Par quel miracle ses mains furent-elles libérées ? Il ne chercha pas le savoir. Redressé mieux qu’un ressort dans le même mouvement que son pote, il fonça bille en tête alors que des explosions retentissaient.

Pas de quartier pour ces salauds ! gronda-t-il.

Une rage sans nom l’habitait. On avait osé attaquer des femmes et des enfants. Qu’ils crèvent !
La chance était de leur côté. Ces malfrats avinés n’offrirent que peu de résistance aux coups acharnés qu’ils reçurent en masse. Un gaillard baraqué armé d’un coutelas lui donna des soucis. Un bon avada kedavra lui aurait si bien arrangé le portrait. Mais le gourdin improvisé de Nate lui sauva la mise.

Je ne supporte pas de voir qu'on te saute dessus!

Pareil pour moi, mon amour !

Clin d’œil complice avant de voir De Brent embrocher proprement le saligaud qui avait présenté Désirée au feu. Nate se rebella, il la serra contre lui, détournant sa tête de ce spectacle vengeur :

S’il s’agissait de Viviane, nous ferions pareil, lui murmura-t-il à l’oreille. Où est-elle ?

Rassuré de la savoir avec Dess et Vic, il se détendit.
Bientôt on put faire le bilan. Les malfrats rescapés furent ligotés, diverses plaies ou bosses se soignèrent alors que les elfes s’occupaient de réconforter l’un ou l’autre. Rationnel, comme toujours, Justin convia ses invités près du feu. Avalant une lampée de pur feu, il décréta :

Ces gens ne sont sûrement pas seuls ! Le reste de la racaille doit nicher sur un rafiot mouillé quelque part. Je… je m’excuse de mon manque de précaution. Le feu a signalé notre présence. On se croyait peinard, on ne l’est pas. Nous devons trouver où est le gros des troupes adverses. Si la méthode que j’envisage déplaît à certains… je m’en tape ! Michael, viens ! Mesdames, je vous conseille de vous écarter.

Il savait que son pote tournerait au même régime que lui mais tenait à ménager la sensibilité des plus « faibles ». Seules Vic et Dess ainsi que la marmaille manquèrent le spectacle. La jeune Grisham se cacha contre la poitrine de Preston mais tint bon tandis que la torture débutait.
Sans aucun plaisir, mais déterminé, Justin déchaussa le malfrat cueilli avec De Brent et maintenu près du feu. Chaque ongle crasseux des pieds reçut un bout de bambou bien planté. Lentement, Davenport les alluma d’un bois enlevé au foyer.

Pour le moment, la chaleur n’est que légère, crapule ! Plus le feu gagnera, plus tu souffriras. Dis-nous où votre navire est ancré. J’ai tout mon temps.

Là-dessus, Justin prit son porte-cigarettes, préleva un tube blanc avant de le faire circuler à qui voulait. La fumée lui dénoua les nerfs tandis que le pirate commençait à geindre. Les cris et hurlements ne durèrent pas longtemps ce qui soulagea grandement tout le monde. Loquace, le bandit meurtri débita jusqu’à sa date de naissance.

Qu’on le ramène avec les autres. Nous savons donc maintenant où nous devons aller. Je veux que chacun s’arme ; le canot a ce qu’il faut.
Nous ne pouvons y aller tous. Manu, Robert, vous veillerez sur nos familles ; les elfes vous seconderont. Les autres… choisissez. Je veux tous les volontaires ici dans cinq minutes, pas plus.

Le plus dur restait à faire : quitter Nate. Il l’entraîna sous un arbre, l’enserrant follement :

Tu dois rester. Je sais que tu as envie de venir, que tu aurais ta place en combattante mais tu dois rester pour Viviane, pour nous. Je reviendrai, promis.

Longs baisers, tendres murmures, ils se dirent adieu.
Fidèles au poste, les révolutionnaires en puissance s’armèrent en conséquence avant de se fondre dans la nuit.

De Brent se trompait. Le plus heureux des hommes, c’était lui : Erik Nielsen. Son Opaline adorée l’avait accepté pour époux, alors que demander de plus ? On ferait la fête voulue chez les Australiens s’ils y tenaient tant que ça mais lui possédait à présent le plus des trésors.
Attention charmante des autres rescapés, on leur déménagea leur tente assez loin des autres. Cris et soupirs ne gênèrent que les oiseaux nocturnes lors de la nuit de noce.
Autre raison de se réjouir, Davenport – celui qu’il désirait imiter – ne l’expédia pas par-dessus bord une fois avéré le naufrage de son beau bateau.
La quiétude après de joyeux ébats fut de courte durée, hélas.

Erik...Erik...lève toi...on fiche le camp...des pi...pirates attaquent!

Hein ? Quoi ?

Encore à moitié endormi, Erik crut qu’un ouragan secouait leur nid douillet. Pourtant, dans le clair-obscur il vit son épouse s’habiller à toute allure et sortir de son sac… une carabine. Que faire d’autre que de l’imiter ? Pantalon, t-shirt, ne prirent qu’une minute à s’enfiler. Déjà Opal l’entraînait dans un recoin de forêt d’où ils purent assister à une scène qui lui glaça les sangs. Il voulut bondir, sa belle avait d’autres idées beaucoup plus réalistes.
Quel carnage ! Car s’en fut un.
Les pétards façon Weasley ajoutés à la pseudo crise d’épilepsie d’Angel semèrent une terrible pagaille juste de quoi permettre aux elfes et Apache d’entrer en scène. Nielsen se jugea trop éloigné pour un tir efficace. Il engagea Opal à le suivre mais elle semblait aux anges de jouer avec son boomerang ravageur.
Le conflit risquant de dégénérer en boucherie, Erik tira en l’air. Les esprits se calmèrent.
Pas longtemps. Un court bilan plus tard, un Davenport inédit soumit un des pirates à une torture peu commune. Des bambous enflammés sous les ongles des pieds… ça valait bien cinq doloris.
Des ordres fusèrent suite aux révélations que ne manqua pas de débiter le bandit.
S’armer ne demanda que quelques minutes. Inutile de réclamer à Opal de se tenir à l’écart. La connaissant, il aurait reçu une baffe s’il lui avait suggéré cette attitude. Même sa frêle copine en serait, alors…
Davenport et De Brent en tête, ils suivirent le mouvement.
Se déplacer en masse dans une jungle n’est pas de tout repos. Nielsen voulait éviter les embûches à sa belle même s’il savait qu’elle le ferait bien toute seule. Ecarter ronces, branches, tout ça le plus silencieusement possible réclama de l’attention.
Personne ne parla. Il fallait à tout prix éviter de donner l’éveil à un garde très possible du camp adverse.
Comme de juste. Soudain les deux hommes de front gesticulèrent dans la clarté lunaire. Ce geste de la main vers le bas ne pouvait signifier qu’une chose : baissez-vous !
Tous obtempérèrent. Le moment de l’action fit remonter l’adrénaline. Se glissant en amont, Nielsen vit nettement deux hommes discutant près d’un feu sur la plage. Non loin se balançait un navire de tonnage léger qui devait être rapide. S’en saisir ne serait pas facile. D’abord, on devait éliminer les vigiles. Le boomerang d’Opaline serait parfait. Lui, arma sa fronde. Ridicule ? Pas tant que ça quand on s’y est exercé depuis l’enfance. Nielsen était un pro et allait le prouver.
D’un murmure, il souffla aux aînés :

On s’en charge.

De connivence avec son Opaline, il la fit prendre position d’un côté tandis qu’il viserait de l’autre. Un cri de chouette retentit. Les projectiles silencieux entrèrent en jeu. Deux corps s’écroulèrent, inconscients. Vite ! Il fallait les entraver puis sans doute faudrait-il nager jusqu’au bateau ?
Pour être rapides, ils le furent. Mais l’absence de ces gardes pouvait alerter les autres depuis le navire. Un bref conciliabule eut lieu. Opal et Erik furent choisis pour prendre la place des surveillants.
Endosser les frusques malpropres des pirates ne les enchanta pas.
Bientôt deux hirsutes prirent place près de feu :

Tu es adorable en pirate, ma chérie. Je te croquerais bien mais là…

Aux autres de s’activer.

Le coup de feu, tiré par Erik, eut un effet lénifiant sur les esprits exaltés. Michael sentit sa rage meurtrière tomber en point mort, presque de mauvaise grâce, il envoya son poing sur la tronche du malfrat retenu par le cou et le laissa tomber. La voix de Victoria lui était parvenue, au milieu des cris. Il la chercha du regard.

Elle était là, serrant Désirée dans ses bras, avec Lucas et Sarah accrochés à ses jambes, l'air terrifié. En deux bonds il la rejoignit pour l'enserrer dans une étreinte délirante.

On va bien, on n’a rien. Et toi, toi ? Tu vas bien ?

Il l'embrassa comme un fou, depuis le début de ce cauchemar, tout son être hurlait vengeance en la voyant subir les affronts de cette racaille immonde. Voir sa fille soumise aux flammes le mena au delà de toute réaction rationnelle. Une fois libéré, sa revanche avait été...déchainée et expéditive.

Oui...je vais bien. Maintenant, je vais bien!

Nouveau baiser avant de se pencher vers les jumeaux et les prendre dans ses bras, les relevant. Les enfants s'accrochèrent à lui en pleurant sans trop savoir pourquoi, affolés par cette situation inédite qui les dépassait.

Allez, du calme, mes anges...c'est fini. Personne ne vous fera du mal, je vous en donne ma parole.

Cela sembla rassurer tout à fait Lucas qui admit être remis à terre et alla se réfugier près de Vic. Sarah ne voulut rien entendre et resta fermement accrochée au cou de son père. Michael s'y plia de bon cœur. Savoir sa famille près de lui, le rassurait plus que tout et comblait tous ses besoins.
Il laissa les autres s'occuper de remettre un semblant d'ordre dans le campement. L'adrénaline retombant à des niveaux normaux, il fallut quand même prendre le temps pour réfléchir à leur situation.

Le pur feu fut le bienvenu, sans se séparer de son petit troupeau, serré autour de lui, Michael vida son verre en écoutant les propos que tenait Justin.

Ces gens ne sont sûrement pas seuls ! Le reste de la racaille doit nicher sur un rafiot mouillé quelque part. Je… je m’excuse de mon manque de précaution. Le feu a signalé notre présence. On se croyait peinard, on ne l’est pas. Nous devons trouver où est le gros des troupes adverses. Si la méthode que j’envisage déplaît à certains… je m’en tape ! Michael, viens ! Mesdames, je vous conseille de vous écarter.

Il avait tout à fait raison. Impossible de penser que ces brigands étaient seuls. Quand son copain parla de la méthode qu'il envisageait utiliser pour soutirer de l'information aux pirates survivants, Michael ne put que sourire, mauvais, et donner son plein assentiment.

Ce ne sera pas du joli à voir, ma chérie..emmène les enfants...ce n'est pas un spectacle ni pour eux ni pour toi!

Sarah rechigna joliment mais il se montra ferme et l'envoya rejoindre le reste de la famille, Dess faisait de même avec ses enfants.

Sans magie, les moyens de bord servirent avec grande efficacité. Personne, à sa connaissance ne résistait longtemps à la torture du bambou, le pauvre bougre en cause ne fut pas l'exception. Il chanta mieux qu'un canari, leur livrant l'information requise en moins de temps que prévu.

Sans faire de commentaire, Michael se munit des armes nécessaires pour leur expédition nocturne. Merci de l'entrainement reçu au MI6, à celui d'auror et encore à ce temps chez les Mangemorts, Michael était, mains nues, une arme létale mais un bon couteau, un pistolet et des grenades n'étaient pas à négliger, à croire ce qu'avait dit le captif...ses compères étaient bardés jusqu'aux dents.

Il se voulut rassurant au moment de quitter sa famille, surtout Victoria qui se serra contre lui en pleurant, le suppliant de ne pas jouer les héros.

Ce qui doit être sera, mon amour, ne t'en fais pas...j'ai vu pire et suis encore d'une pièce. C'est pas ce soir que tu vas te défaire de moi!

Lui essuyant ses larmes, chercha sa bouche aimante en un baiser incendiaire avant de s'écarter et partir presque au pas de course...avant que les bonnes intentions ne flanchent piteusement.

Justin réunit sa troupe à l'orée de la palmeraie pour donner les dernières directives. Tous ou presque étaient de la partie. Robert avait été requis de rester pour veiller sur le campement en compagnie de Manu et Le Kerouec. Charlie, elle, n'avait rien voulu entendre de rester et ressemblait pour l'heure à une espèce de Rambo au féminin. Opal et Erik, les inséparables, semblaient très contents de continuer à prendre part à l'action. Preston, très serein, rassemblait sans doute ses souvenirs d'autres guerres , prêt à démontrer ce qu'il valait au moment de la vérité. Le regard dont le couvait Angel, suffisait sans doute pour le faire se sentir héroïque. Dess avait laissé ses enfants aux bons soins de Nate et Vic et suivait son mari.

Ce n'était pas une jungle trop dense ce qu'ils traversèrent mais il fallait bouger le plus silencieusement possible , la lune fournissait une pâle clarté, à peine suffisante pour voir où on mettait les pieds.

Ils aboutirent enfin en vue du campement adverse. à quelques brasses de la plage mouillait l'embarcation des bandits. Un joli morceau de rafiot...tonnage lèger, moderne et sans doute rapide. Ce serait une prise en rien négligeable qui leur permettrait de quitter l'île.

Les Nielsen, en parfaite synchronisation, mirent hors combat les deux hommes qui montaient la garde prés du feu, à l'attente certainement de leurs compagnons. Les jeunes gens prirent discrètement la place des vigies. Restait à nager vers le bateau et tomber sur les brigands à bord.

Il y a une vigie sur le pont!, souffla Michael à Justin, s'il fait un peu d'attention, doute pas qu'il nous verra...se faire farcir de plomb dans l'eau ne serait pas de la gaieté...je peux nager cette distance sous l'eau, sans problème...

Si son ami voulut protester, c'était trop tard, Michael était déjà dans l'eau et plongeait silencieusement. Comme prévu, parvenir au bateau ne lui posa aucun problème, pas plus que se hisser à bord. Pas le temps de faire des crises de conscience. L'homme ne sut jamais ce qu'il lui était arrivé. Le couteau avait fait son travail avec meurtrière efficience. Juste à temps...une voix venant du corps de logis s'enquérait sur des nouvelles.

Rien par là!, grommela Michael en priant pour que ça sonne convainquant. Cela sembla être le cas. L'autre retourna à l'intérieur. Lui, se glissa vers un de hublots, pour jeter un coup d'œil...Huit hommes se trouvaient réunis autour d'une table...ils buvaient et parlaient fort.

*S'il sont ivres...ce sera un jeu d'enfants...mais à moins que le capitaine de ce rafiot soit un imbécile perdu, il doit avoir quelqu'un de sobre à bord...mais enfin...*

Cachés sur le rivage, Justin et sa troupe réagirent au signal...Cinq minutes plus tard, tous étaient à bord. Michael se sentait d'une belle humeur expéditive...ça lui tardait de rentrer auprès de Vic.

Suis de l'idée d'ouvrir la porte en douce et de lancer une grenade...

On lui lança un regard imprécis en se demandant s'il ne regardait trop de télévision mais l'idée lui plaisait de plus en plus.

Je vous assure que la surprise sera totale! Ça en fera sauter quelques uns, le reste sera sonné alors on entre et affaire close...enfin, à vous de voir...et non, ça ne me pose pas de problème de les envoyer en enfer sans le temps de dire ouf...pour moi, cette racaille ne mérite que la mort...on rendra service à l'humanité, en passant...mais bien sûr, faut compter qu'il y a certainement d'autres...mais je parie qu'ils dorment...

Si on lui avait dit que ses noces tourneraient ainsi, Dess aurait ri comme une folle. Folle, elle l’était de son nouvel époux infiniment plus prévenant que le précédent. Folle, elle le devint quand les pirates menacèrent le bébé. S’ils s’en prenaient aux siens, Mrs Green se sentait capable de tuer.
Par une intervention géniale des Nielsen et la comédie d’Angel, tous purent régler des comptes. La jeune mère se devait à ses enfants avant tout aussi se désintéressa-t-elle des scènes atroces pour aller couver ses poussins. Les hommes préparèrent une expédition punitive. Ils devaient prendre les devants. Cette racaille risquait d’envoyer d’autres gens quand ils ne verraient pas les autres rentrer.
Ce fut très difficile pour elle et Vic de s’occuper des enfants tout en essayant de négliger les cris d’un torturé.
Nate les rejoignit bientôt, la mine tracassée. Justin lui interdisant de se mêler au groupe. Auror de formation, Dess sut qu’elle devait y aller. Ses précieux rejetons confiés à ses amies, Leroy, Robert, Kérouec et les elfes en vigiles, elle pouvait les quitter. Le plus difficile fut d’attacher Apache. Toute dressée qu’elle soit, il était difficile de prévoir ses réactions en plein combat. Elle venait d’égorger un des malfrats… La patience de Vic fit merveille.
La troupe armée s’ébranla. Elle ne tarda pas à trouver le mouillage du navire ennemi. Deux hommes veillaient sur la plage. Opal et Erik s’en chargèrent proprement et silencieusement avant de prendre leur place.
Tandis que le gros de la troupe restait tapi derrière un rideau d’arbres, De Brent réussit un bel exploit nautique. A son signal, tous se mouillèrent. Leurs vêtements légers n’entravèrent pas leur progression silencieuse jusqu’au bateau où chacun se hissa dans la nuit.
Un bref conciliabule se tint sur le pont où gisait un cadavre sanglant.

Suis de l'idée d'ouvrir la porte en douce et de lancer une grenade...
Je vous assure que la surprise sera totale! Ça en fera sauter quelques uns, le reste sera sonné alors on entre et affaire close...enfin, à vous de voir...et non, ça ne me pose pas de problème de les envoyer en enfer sans le temps de dire ouf...pour moi, cette racaille ne mérite que la mort...on rendra service à l'humanité, en passant...mais bien sûr, faut compter qu'il y a certainement d'autres...mais je parie qu'ils dorment...

Certes la surprise serait totale mais la méthode très brutale ameuterait les autres sans compter le risque de perdre le seul navire disponible. Pourquoi avait-elle eu l’idée d’emporter des fioles dans cette équipée guerrière ? Ce n’était pas le moment d’y penser. Michael n’avait pas tout à fait tort de vouloir envoyer ces gens en enfer, mais… Elle exposa son plan très simple :

Nous allons mettre le feu au navire.

Des murmures étonnés lui répondirent :

Ne vous inquiétez pas c’est un faux feu. Ça dégagera beaucoup de fumée, à croire que tout le pont sera la proie des flammes. Je suggère que chacun prennent un gourdin, ou… couteau et attende la débandade qui ne manquera pas. Euh… portez un mouchoir sur le nez…

Elle craignit que le bouillant Michael ne s’y oppose mais Justin accorda cette solution. Tout se mit en place très vite. Angel, la plus jeune, devait être ménagée. On lui assigna d’actionner la cloche le moment voulu, ce qui parut la chagriner.
Pendant qu’ils se mettaient en position, Dess sortit ses fioles. Goutte de ceci avec cela, une terrible vapeur irritante s’éleva.
Ding, ding, ding, ding, ding, ding !!! Un vrai carillon retentit alors qu’un des hommes hurlait « au feu ! au feu »
Grand branle-bas !
Ça se bousculait au portillon, pas à dire.
Gênés par l’âcre fumée, les pirates sortirent rapidement en toussant et crachant. Chacun reçut son lot de coups. Les dernières volutes s’éloignèrent, un fameux spectacle se précisa.
Retrouvant les bras aimants de son Bryan, Dess se rassura sur son état avant de déclarer, songeuse :

Qu’allons-nous faire d’eux ?

Au coucher du soleil, pour faire le plus bel effet, Preston joua de nouveau les cameramen pour immortaliser l'union de la jeune australienne et du prince suédois. Ils formaient un sacré couple, ces deux là. Il ne laissa pas un instant de remarquer l'expression émue affichée par sa petite sorcière bien aimée. Dieu, qu'elle était adorable!...mais Seigneur, qu'elle était jeune! Il n'avait cesse de se demander s'il faisait bien, si tomber amoureux d'elle n'était pas une folie. Leurs vies ne pouvaient être plus différentes, jusqu'à quelque temps auparavant, distantes l'un de l'autre en années lumière. Elle dans son monde, lui, dans le sien. Elle finissait à peine ses études sorcières et avait 18 ans, lui, en avait 29 et avait déjà couru la moitié de la planète, après les nouvelles les plus trépidantes, les guerres les plus sanglantes et pas mal de femmes intéressantes. Angel était une jeune fille sage, rangée, habituée à une existence paisible. Lui, on le reconnaissait là où qu'il aille, sans être une superstar, il était tout de même une espèce de vedette et sa vie privée était tout aussi exposée à la curiosité du public, que ses reportages...

Mais il suffit d'un sourire, un regard...réflexions pleines de maturité s'envolèrent vers les étoiles...et puis on s'en fichait un peu des problèmes. On finirait bien par s'arranger...

Le mariage dûment fêté, tout le monde s'égaya dans ses respectifs quartiers.
Manu Leroy et lui prendraient le second tour de garde. Assis près du feu, les deux hommes bavarderaient à bâtons rompus. Si Preston était un bon conteur, Manu ne demandait pas faveur. Ce ne serait pas une garde triste...

De bonne humeur, ils échangèrent encore quelque propos avec Justin et Michael en allant les relever...puis le monde bascula dans un puits sombre...

Aouch...ma tête!, se plaignit Preston en ouvrant, enfin les yeux...pour les refermer aussitôt, se croyant encore au creux d'un cauchemar tiré d'un film d'action sanglante... À deux pas de lui, Michael venait de briser le cou d'un homme et Justin en battre férocement un autre...en fait, où qu'il regardait, c'était la bataille rangée. Il ne tarda pas à comprendre la situation...et se relevant, plus ou moins titubant, prit part à la bagarre...

Angel retrouvée, le mit au courant des derniers évènements survenus alors qu'il voguait au delà de la conscience. D'ailleurs, Justin réunissait un conseil de guerre et décidait régler l'affaire sans tarder. Preston n'avait jamais imaginé Davenport capable de tant de froideur au moment de torturer un des prisonniers...mais d'après ce qu'il avait appris sur les agissements des brigands, ils avaient largement mérité ça et plus encore. Information en main, l'expédition punitive fut rapidement mise à l'exécution...et pour Preston pas question de rester au campement...il serait de la partie, autant que sa petite chérie, même s'il aurait préféré la savoir en sureté auprès des femmes qui restaient. Elle fut très ferme et claire pour lui faire comprendre que pour rien au monde elle n'allait se perdre de ça...adorable et courageuse. Son amour pour elle monta d'un cran!

*T'es fou, Yates...fou perdu...et toi qui croyais que c'était des histoires de bonne femme, l'amour.*

Arriver à bord du bateau pirate fut pratiquement un jeu d'enfants. À terre restait le jeune couple Nielsen, supplantant les deux brigands de garde. À bord, Michael avait proprement expédié la vigie à l'au delà et proposait une action, un peu brutale, pour mettre les pendules à l'heure. Comme journaliste, Preston était plus habitué à suivre l'action qu'à la dicter, un peu surpris de découvrir que ses copains étaient des durs, qui n'avaient pas froid aux yeux au moment de se battre...Justin plus tranquille que Michael qui, lui, ne cillait pas à l'heure de tailler un ennemi en pièces.

*On ne connait jamais une personne à fond...quelle chance d'être de leur côté!"

Pour son bonheur, une fois décidé ce qu'ils allaient faire, Angel fut désignée pour faire sonner le tocsin...puisqu'on allait jouer à l'incendie. Comme prévu par la belle Mrs. Green, son idée était moins destructive que celle de De Brent, les pirates croyant que leur bateau brûlait de fond en comble, se ruèrent vers la sortie...

Coups de bâton, de chaîne, de poing, de couteau si nécessaire...ce fut une belle cueillette mais la chose menaça de se gâter quand quelques autres méchants, sortis par une autre porte, se pointèrent armés d'automatiques...repli stratégique des troupes. Preston , angoissé, chercha Angel des yeux, mais ne la voyant pas, supposa qu'elle s'était mise à l'abri comme tout le monde...déjà la fusillade se déclenchait. Charlie Rockwell les surprit tous avec son efficience arme au poing, elle ne ratait pas sa cible. Justin était un tireur d'élite. Michael avait reçu un entrainement de "marine". Les Green démontraient qu'à la moldue, ils étaient autant à craindre que baguette en main. Preston allait souvent à la chasse et n'avait pas à se plaindre des résultats, bien que là, le gibier fut...différent.

Ce ne fut pas long à finir. Les pirates, surpassés, du moins ceux qui restaient debout, déposèrent les armes.

Quelqu'un a vu Angel?

Michael lui assura que la dernière fois qu'il l'avait aperçu elle sonnait la cloche.
Dess, qu'elle l'avait vue se mettre à l'abri derrière un tas de cordages...

C'était ainsi, effectivement. Tassée sur elle même, la jeune fille ne releva pas la tête quand il s'approcha.

Ma chérie...c'est fini. Viens, sortons de là et allons...

Quelque chose clochait terriblement. Preston en eut la certitude. En sentant son cœur démarrer sous le coup de la panique, il la prit doucement par le bras et l'attira vers lui...Horrifié, il découvrit une large tâche de sang s'élargissant sur ses vêtements.

Mon Dieu...Angel...ma chérie! Angel!!!

Son hurlement fit accourir les autres...Angel, inerte dans ses bras, Preston pleurait comme un gamin éperdu. Dess et Charlie prirent l'affaire en main, tandis que Michael et Justin écartaient le journaliste hagard.
Après un bref examen, Charlie, qui avait le plus de compétences comme médecin, décréta que si bien blessée, Miss Grisham ne courait pas de danger de mort. Une balle avait proprement traversé son épaule, elle avait perdu pas mal de sang et se trouvait en état de choc mais avec les bons soins, elle se remettrait vite.

Je...je vais la porter à l'intérieur!, assura Preston, assez remis de la pire peur de sa vie.

C'était le mieux à faire. Déjà Justin alertait les Nielsen qui ne tardèrent pas à les rejoindre, après s'être assuré que les malfrats de la plage n'iraient nulle part. Opal courut rejoindre son amie dont Charlie et Dess prenaient soin, laissant aux hommes le soin de décider ce qu'ils feraient à la suite.

On enferma les méchants dans la cale de leur navire. En bon marin, Justin prit les commandes. Ancre levée, le bateau se mit en mouvement.

Dans la salle commune, Angel avait repris ses esprits, abasourdie de se retrouver entourée de visages anxieux, celui de Preston surtout...même s'il se força à sourire, ravi.

Tu nous as fichu la trouille, ma douce...mais tout va bien maintenant, il lui caressa tendrement les cheveux en baisant son front, je t'aime...ne bouge pas, mon ange...reste sagement là...Charlie a soigné ta blessure mais ça fera encore mal quelques jours.

Elle sourit et retint sa main.

Ne t'en fais pas...je ne pensais aller nulle part...je resterai avec toi, toujours, si tu veux de moi.

Une nuit de volupté, douce et charnelle, quoi de mieux pour sa nuit de noce ? Mais elle fut de courte durée, des pirates avaient prit d’assaut le campement et aussi la petite nouvelle, Bryan était fou de rage en voyant ces bandits s’en prendre sans ménagement au bébé De Brent, il ne put faire aucun geste, poings liés à son épouse, et bâillon en bouche. Heureusement que les sauveurs étaient là, les nouveaux époux Nielsen ainsi que les elfes de maison et surtout le couguar. Le jeune auror fut vite libéré de ses liens et fonça dans la bataille, aucun des mauvais hommes furent épargnés par les poings des sorciers. Au bout d’un interrogatoire musclé, le pirate révéla tout ce dont il savait. Dess les rejoignit pour participer au combat qui devait avoir lieu sur le navire pirate, ne refusant rien de la part de sa femme, qui était de surcroit une bonne auror, il lui serra la main pour qu’elle sache qu’il était d’accord pour qu’elle les accompagne, les jumeaux seraient en sécurités au campement.

La troupe se mit en route, Arrivés sur le rivage là où se trouvait amarré le bateau, Michael plongea à l’eau sans crier gare, puis discrètement planta le couteau dans le corps d’un robuste, Bryan attendit avec les autres le signal pour se jeter dans la bataille. Aidant son épouse à monter à bord, il se hissa à sa suite et écouta les commentaires de l’auror, il voulait lancer une grenade et d’une pierre deux coups exterminer les pirates en factions sur le bateau. Son idée n’était pas si mauvaise mais leur transport marinier en prendrait un sacré coup et ils resteraient encore sur cette île pendant combien de temps encore. Avant de pouvoir dire quoi que ce soit Dess prit la parole en parlant de mettre le feu au navire, tous furent choqués de son plan, mais Bryan savait que sa femme n’avait pas fini de parler, elle se lança donc dans une explication.

Ne vous inquiétez pas c’est un faux feu. Ça dégagera beaucoup de fumée, à croire que tout le pont sera la proie des flammes. Je suggère que chacun prennent un gourdin, ou… couteau et attende la débandade qui ne manquera pas. Euh… portez un mouchoir sur le nez…

*Quelle idée formidable, c’est une vrai aventurière ma petite femme.*

Très fière de sa Desdémone, le jeune auror la serra dans ses bras et attendit que les autres approuvent son plan, en quelques minutes, ils étaient tous prêts à foncer dans le tas, les mouchoirs sur la bouche, et le faux feu se rependit sur le pont. Un regard à Angel et la cloche sonna de plus en plus fort, puis un à un les pirates sortirent de la cabine et chacun eut le droit à son lot de coups. Un uppercut par ci, une baffe par là, des coups de pieds de poings volèrent dans tout les sens.
Au bout d’un petit quart d’heure, les pirates furent maitrisés et ligotés tous ensemble sur le pont. Dess se jeta dans les bras de Bryan pour s’assurer qu’il n’avait rien. Lui aussi fut soulagé de voir son épouse en un seul morceau, l’embrassant avec une passion dévorante, il l’écouta lui demander ce qu’ils allaient bien faire de ses malfrats, une questions à creuser.

Et bien ma chérie je pense que nous allons les laisser livrer à eux même sur cette île, ils ont presque tué Désirée et ils ne méritent pas de pitié, s’en prendre à un enfant c’est punissable !! Sinon, nous pouvons les emmener avec nous et les livrer à la police moldus une fois de retour……

Le bel homme ne put en dire d’avantage, des cris de terreurs lui firent tourner la tête, c’était Preston qui hurlait :

Mon Dieu...Angel...ma chérie! Angel!!!

Accourant au près du journaliste, Bryan vit du sang éparpillé sur les vêtements de la jeune Angel, elle était mal en point, laissant Dess et Charlie s’occuper de la blessée, les trois hommes s’occupèrent d’éloigner Preston, il était en état de choc, ça se comprenait parfaitement. Si il était arrivée la même chose à son épouse Bryan serait sans doute dans le même état d’esprit.
Les deux femmes revinrent expliquer que la blessure n’était pas si grave, le chevalier servant de la demoiselle l’emporta dans ses bras pour la conduire à l’intérieur.
Une fois les pirates emprisonnaient au fond de cale, Bryan resta avec Justin et Michael pour voir la marche à suivre. Les époux Nielsen les rejoignirent sur le bateau et Justin en bon marin qu’il était fit démarrer le navire et ils voguèrent jusqu’au campement où les autres les attendaient le cœur serré.

Une fois les familles retrouvées, Bryan aida Dess à descendre et tout deux allèrent voir les jumeaux qui dormaient profondément, comme si rien ne s’était passé.

Tu vois ma chérie, ce sont des anges, même la petite, je suis le plus heureux des hommes, avec toi et les enfants…..

La serrant dan ses bras, Bryan l’embrassa éperdument, il avait vraiment eut peur pour elle lorsqu’ils s’étaient jetés dans la bagarre, il avait gardé un œil sur elle à chaque moment.

Je t’aime ma belle….. Et nous allons pouvoir enfin renter chez nous, j'ai vécu le plus beau des mariages....

A une horreur en avait succédé une autre. Ecoeurée, collée à Preston, elle avait assisté à la torture du pirate dans le but de lui faire avouer où les autres étaient planqués.
Pour dégoiser, il n’y avait pas manqué.
Conseil de guerre expéditif, randonnée punitive organisée, Angel ne voulait pas s’y soustraire, honneur oblige, quoique son chéri lui chante pour l’en empêcher.
Le premier rempart adverse fut vite balayé par l’adresse d’Erik et Opal dont la totale complicité était plus qu’évidente et émouvante.
Ensuite, au signal de De Brent, tous s’étaient rendu sur le navire pirate. Un plan rapide s’établit. Angel râla. On ne lui assignait qu’un rôle mineur, celui de sonneur de cloche. Ce serait le déclic de l'attaque, d’accord, mais elle aurait préféré être dans le bain comme Preston et les autres qui ne tardèrent pas à en découdre dès que le feu factice attirât les malfrats hors du nid.
Depuis sa planque, elle observa comme elle put les échanges et coups des uns et des autres, son regard cherchant naturellement la position de celui pour qui son cœur battait. Elle sourit en voyant le journaliste se ruer bravement dans la mêlée. Des coups de feu claquèrent.
Sciée par la douleur soudaine qui lui vrilla l’épaule, elle y porta la main, surprise d’y voir autant de sang.

Pres… Preston…

Son murmure ne fut perçu par personne dans le vacarme de la bataille. Tout devint noir, elle sombra. Angel aurait pu mourir exsangue dans son coin sans l’intervention de son élu qui la découvrit et ameuta les secours.
Le brouillard se dissipa, elle ouvrit les yeux sur des visages anxieux. Elle n’en voulait qu’un. Il était là, lui caressant les cheveux, lui embrassant le front :

Tu nous as fichu la trouille, ma douce...mais tout va bien maintenant, je t'aime...ne bouge pas, mon ange...reste sagement là...Charlie a soigné ta blessure mais ça fera encore mal quelques jours.

Elle émit une sorte de sourire et retint la main aimée dans un appel muet :

Ne t'en fais pas...je ne pensais aller nulle part...je resterai avec toi, toujours, si tu veux de moi.

Incapable de parler, Angel cligna des paupières humides en acquiescement. Douter de vouloir de lui? Il rigolait. Elle en était folle.
La suite, pour elle, ne fut qu’une succession de flashes intermittents. Tantôt lucide, tantôt dans les vapes, Angel suivit comme elle put les événements. Selon ce que son esprit capta, on regroupa tous les malandrins au campement où ils furent abandonnés avec quelques provisions. Le navire, sous la gouverne de Justin et Nielsen, toutes familles embarquées, reprit la mer. Des échos ouïs, elle conclut que la radio du bord ne fonctionnait pas encore.

*Champ magnétique* Preston chéri, dis à Justin d’aller plein ouest.

Boum ! Elle retomba dans le cirage. La houle sévère la rendait nauséeuse. Nul aliment solide ou liquide ne franchissait ses lèvres décolorées avant d’être régurgité aussitôt. Parfois, elle pleurait :

Je ne l’ai pas fait exprès.

Le délire la reprenait sans qu’elle en eût conscience.

Ben ! Benji ! Benjiii !! Pardonne-moi, je t’aimais. Preston, t’es où? J’ai tant besoin de toi...

Une caresse douce sur son front, un affleurement des lèvres l’apaisaient un peu avant que la fièvre ne la reprenne.
Charlie et Dess étaient inquiètes, elle le percevait entre deux moments d’égarement :

J’ai chopé un microbe, hein ? Pourquoi on me dit rien ?

Chaud, froid, sueurs et tremblements, Angel lutta :

Je ne veux pas mourir ! hurla-t-elle en se débattant. *Papa, Maman, aidez votre Erin*

D’une voix étrange elle donna des coordonnées :

Cap 21. 18N 157. 51W

Fondu au noir.
Des sirènes ? Douleurs, chaos puis, enfin, calme et paix. Battant des cils, Angel ouvrit les yeux sur une pièce immaculée qu’illuminait un soleil généreux. Plus aucune peur ne l’habitait. Sur elle se penchait le visage aimé :

Preston, mon amour, sommes-nous saufs ?

Un rire étranglé suivi d’un baiser époustouflant le lui confirma : ils étaient à bon port.