Aux grands maux, les grands remèdes(fe Isela)

L’approche des examens rendait Carter particulièrement nerveux, comme chaque année. Il voulait toujours se surpasser, un autre sport que le Quidditch en quelque sorte. Mais le rythme infernal qu’il s’imposait le fatiguait plus que d’ordinaire. Cela ne lui valait rien, il s’en rendait compte mais rien n’aurait pu le faire changer d’optique. Levé à 5 heures du matin, il était déjà plongé dans les bouquins au petit déjeuner. S’il n’était pas en cours, on pouvait être certain de le trouver à la bibliothèque. Le teint très pâle, les yeux gonflés, il faisait des efforts pour tenir éveillé dans les différentes classes encore à assumer avant le grand blocus.
Ce jour-là, Adam traîna ses godasses jusqu’aux cachots où se donnait le cours de potions.
Il aimait bien cette matière et y brillait généralement. La seule chose embêtante était qu’il fallait souvent travailler en binôme. Solitaire par excellence, Carter se serait bien passé de ça mais impossible d’y échapper. D’habitude, il était tellement doué qu’il se tapait tout le boulot ce dont son acolyte ne se plaignait jamais. Là, il se vit attribuer une fille brune au teint mat. D’emblée, il ne l’encaissa pas. Elle avait un je ne sais quoi de Miss je sais tout qui lui déplut grandement. La façon dont elle coupa ses racines de marguerite l’horrifia :

Excuse-moi mais on doit obtenir des tronçons, pas de la purée, et…

Le regard noir de la demoiselle lui cloua le bec. Pas pour longtemps car, décidément, cette fonceuse allait trop vite en besogne :

Arrête de piler ces épines, on ne les veut pas en poudre, on doit…

C’est qu’elle avait le verbe haut, la donzelle ! Remis à sa place, Adam tenta de se concentrer. Les remarques perfides ne manquèrent pas de juger son travail. La moutarde monta :

Si tu crois y arriver mieux que moi, vas-y, te gêne surtout pas !

Il rigola en lui-même parce que, vraiment, cette Isela s’y prenait comme un pied. Ça commençait à bien faire… Il n’y tint plus :

3 grammes d’yeux de scarabée, pas 30 ! T’es aveugle ou quoi ? Laisse-moi faire !

Déterminé, il lui piqua la balance sauf que la miss ne l’entendait pas de cette oreille (de l’autre non plus) Une courte lutte s’engagea. Le prof abattit sa baguette sur leur table de travail, de quoi les calmer un instant.

Tu veux tout faire rater ? grinça-t-il entre ses dents tout en dosant les ingrédients. C’est bien parti. Je crois que ça y est et… NON !

Il n’avait pas achevé sa phrase que Miss De la Vega balançait la mouture dans leur chaudron.

J’avais pas fini, triple idiote ! Maintenant…

Une fumée épouvantable s’échappait du récipient chauffé. L’explosion mit tout le monde par terre. Vert de rage, Adam se releva en accusant la maladresse de son binôme qui répliqua des trucs incompréhensibles en espagnol.
Le prof n’y alla pas par quatre chemins : colle commune ! Dégnomer le potager, rien de moins.
Rassemblant ses affaires, sans un regard à la fille, Adam quitta la salle de cours dévastée.

Tiens! Il faisait beau. Trop beau comme pour aller s'enfermer dans une salle de classes au lieu de pouvoir faire une belle petite promenade...mais non, il fallait étudier, aller en cours dans l'espoir de passer tous les examens et en finir d'une fois pour toutes avec l'école. Cette idée rasséréna quelque peu ses esprits...retourner chez elle, voilà tout ce que voulait Isela!

À mi chemin vers les cachots, pour le cours de Potions, sa mauvaise humeur avait refait surface. Aller s'enfermer dans un endroit si lugubre n'allait sûrement pas l'améliorer. La dernière fois elle avait dû partager table et chaudron avec une Poufsouffle facile à épouvanter mais voilà que cette fois la chance ne lui souriait pas...à la place de la timide Jaune et Noir se trouvait un Serdaigle.

Peu disposée à se gagner les bonnes grâces de son compagnon de binôme, la Serpentard posa brusquement son sac sur la table, lui décocha un regard mauvais et lui ordonna de se pousser. L'autre qui, d'entrée avait l'air plus endormi qu'autre chose, obéit....mais ne tarda pas à donner signes de récupération. Il semblait vraiment savoir de quoi allait l'affaire, tandis qu'elle assassinait joyeusement ses racines de marguerite.

Excuse-moi mais on doit obtenir des tronçons, pas de la purée, et…

La jeune fille resta un instant le couteau levé en l'air et le regarda avec une morgue écrasante.

Je les aime en purée moi!

L'ignorant vertement, elle continua à faire ce qu'indiquait le livre ou plutôt ce qu'elle avait envie de comprendre. Il ne tarda pas à récidiver.

Arrête de piler ces épines, on ne les veut pas en poudre, on doit…

Elle ne posa pas pour autant le pilon tout en le considérant avec le même respect qu'à un cancrelat indésirable.

M'en fous! Occupe toi de tes affaires et fiche moi la paix...una más y que te cargue el diablo, cuate! (une de plus et que le diable t'emporte, l'ami).

Quand elle était fâchée, Isela avait la mauvaise habitude de retourner à sa langue maternelle, suffisait d'entendre le ton d'ailleurs pour en comprendre l'essence.

Ravie, elle remarqua l'avoir énervé...en fait, le pauvre garçon semblait un peu hors de lui.

Te coupe pas le doigt, Serdy...ça gâche la potion!...C'est pas de l'autre côté, que tu devrais tourner, génie?...Oups, je crois qu'une de tes cheveux vient de tomber dedans!

Enragé, il fini par la dévisager, hargneux:

Si tu crois y arriver mieux que moi, vas-y, te gêne surtout pas !

Elle haussa les épaules, dédaigneuse et s'attela à la tâche mais la concentration s'était perdue...ou était tombée au fond du chaudron tant qu'à faire. Ses gestes n'étaient pas précis et le regard de Carter, c'était bien son nom, rivé sur son crâne n'aidait pas trop. Avec un rien de degoût, elle commença à peser les scarabées quand l'autre bondit:

3 grammes d’yeux de scarabée, pas 30 ! T’es aveugle ou quoi ? Laisse-moi faire !

Ce disant, il voulait lui prendre la balance des mains. Isela n'était pas disposée à se laisser faire. Ils ressemblaient à deux gosses de maternelle se disputant pour le même jouet. L'opportune intervention du professeur mit fin à leur querelle et tout rentra dans un ordre apparent. Pendant un moment, elle le laissa faire mais n'y tenant plus, apporta son grain de sel...voilà pour la mouture!

Elle eut le temps de l'entendre la traiter d'idiote avant de se retrouver par terre, comme tout le monde, prof inclus. Déjà son adorable binôme se relevait, blême de rage en l'accusant vertement...la miss, qui n'avait pas la langue dans sa poche, sauta comme une furie et l'affubla de tous les noms d'oiseau en langue castillane manquant de peu de lui taper dessus.

Résultat final: colle...et pas n'importe laquelle.

Elle attrapa son sac au vol et courut derrière le Serdaigle qui abandonnait le champ de bataille.

Hey, toi, où crois tu que tu files comme ça!? Je n'entends pas du tout faire ce sale travail par ta faute!

Le voyant prêt à riposter, elle leva un doigt menaçant et le vrilla d'un regard noir de colère mal contenue. Pas Serpentard pour de prunes!

C'est pas un Serdaigle stupide qui va faire qu'Isela de la Vega dégnomise quoi que ce soit...alors, arrange toi comme tu pourras!

Un raclement de gorge derrière eux mit fin à l'orageux entretien. D'un regard chargé de foudre, le professeur leur signifia d'aller s'acquitter à la tâche...à main nue.

C'était affreux. Ignominieux. Insultant. Inhumain. Après une heure de courir après ces créature esquives et d'entendre leurs cris pointus, Isela était à point de se déclarer vaincue. Son camarade de colle semblait s'y prendre mieux qu'elle, en effet, pas mal de gnomes avaient déjà pris la voie des airs par dessus la haie...tandis qu'elle n'en avait pris que trois, ce qui lui valait des coups d'œil narquois de la part du Serdaigle.

Tu as fini de te payer ma tête!? Tarado!

Sans trop y penser, elle lui balança dessus le dernier gnome attrapé. Sa réplique la fit enrager encore plus. Il osait...

Trop c'est trop, abandonnant toute réserve civilisée, Miss de la Vega-Parke fonça sur le malotru décidée, à lui régler son compte de façon plus ou moins...expéditive!

Dégnomer le potager… Il y avait si longtemps qu’Adam n’avait pas mis un pied dehors qu’il fut quasi ébloui par la lumière extérieure. La teigne l’avait suivi, le nommant de noms inconnus dont il se ficha éperdument.
Une créature se présenta :

Fichemoilapaix

Hop ; trois petits tours et puis s’en vont. Les gnomes se succédèrent ; Adam était en rogne.

*Plus vite fini, plus vite tranquille*

Tu as fini de te payer ma tête!? Tarado!

Adam n’était pas une lumière mais l’insulte fut comme une baffe en pleine poire.

Tu te prends pour qui ? Tarée toi-même. Sans toi, on ne serait pas là ! Les Gnomes sont idiots. T’as pas saisi le truc ? C’est pourtant élémentaire, un gosse de six ans y arriverait.

Preuve à l’appui, il empoigna une créature qu’il fit valdinguer des mètres plus loin.
Elle répliqua de maîtresse façon, son pauvre gnome hurlant de quoi ameuter le voisinage.

T’es dingue ? Ce sont des êtres vivants. Ils méritent un peu de respect.

Ce qu’elle lui débita le fit sortir de ses gonds.

Jamais je n’ai frappé personne. Foi de Carter, t’en mérites une bonne.

L’hystérique lui sauta dessus. Il devait la calmer, absolument, sous peine de voir leur colle allongée indéfiniment. Roulant au sol, ils s’arrachèrent cheveux et peau avant qu’une illumination n’atteigne Carter.

*Faut qu’elle se taise où on est bon !* Tais-toi !

Sa bouche se colla sur celle d’Isela. Longuement, un ange passa…

Lui balancer le gnome sur la tête n'avait pas été le mieux à faire, mais Isela, nature impulsive, agissait sous l'empire de la colère. Trop habituée à voir son petit monde danser au son de sa musique elle supportait mal les répliques et encore moins l'insolence et il fallait dire que ce Serdaigle se prenait pour quelqu'un.

T’es dingue ? Ce sont des êtres vivants. Ils méritent un peu de respect.

Cette remarque absurde la fit rire, sarcastique.

Oh, monsieur défend les gnomes. Tu n'en serais pas un par hasard? Hyper développé...sauf le cerveau...tu vas commencer à courir par là en piaillant "fichemoilapaix...fichemoilapaix"? Tu veux que je te balance par dessus la haie, toi aussi, gros gnome!

Ça eut l'effet de le faire se fâcher tout rouge...en toute évidence être comparé à un gnome ruinait son égo.

Jamais je n’ai frappé personne. Foi de Carter, t’en mérites une bonne.

Pauvre idiot...tu oses me menacer...tu vas savoir de quel bois je me chauffe!

Elle s'amusa prodigieusement en voyant la tête qu'il tira quand elle lui tomba dessus, toutes griffes dehors et l'empoigna par les cheveux, en le maudissant en toutes les langues connues. Ça faisait un drôle de grabuge, il faut dire. Un spectacle des plus édifiants en plus, voir ces deux là rouler par terre comme deux chats sauvages.

Ce qui s'en suivit fut néanmoins...très inespéré. Soudain plaquée à terre par le Serdaigle qui résulta plus musclé que soupçonné, Isela voulut crier encore quand...il ne trouva rien de mieux que l'embrasser.

Pendant un instant...ou encore un peu plus, elle resta là, trop siderée comme pour réagir. Cette bouche inexperte collée à la sienne, dans un essai plutôt maladroit de baiser...

Reprenant ses esprits, elle se dégagea brusquement, le repoussant avec force. Ils restèrent assis par terre se dévisageant, sans trop comprendre ce qu'il se passait.

Ça te prend souvent faire...des choses pareilles?

Elle aurait pu jurer que non. Il avait, en le regardant bien, un petit air de garçon bien, poli et sensé. Un peu pâlot mais tenant compte qu'il passait sa vie à dévorer des livres...ça elle l'avait personnellement constaté lors de ses visites, obligées, à la bibliothèque.

Encore plus bizarre fut sentir que sa hargne contre lui était tombée, ce qui faillit la faire se fâcher de nouveau mais se contenta de le considérer, boudeuse.

Tu as une drôle de façon de t'y prendre, avec les filles...Carter, grommela t'elle en se relevant et époussetant ses vêtements,soit...j'admets t'avoir provoqué...mais tu ne rends pas les choses faciles, non plus, avec tes airs de petit malin au retour de tout...tu es agaçant.

*Et toi, une sainte!?*

Pour distraire l'atmosphère soudain dense, elle attrapa un pauvre gnome qui voulait détaler, et avec tout la délicatesse possible l'envoya de l'autre côté de la haie.

Ça te va comme ça, M. Je Fais Tout à la Perfection?

Un regard aux alentours lui laissa savoir que les indésirables créatures avaient soit pris toutes la voie des airs soit pris la poudre d'escampette.

Ça y est...il n'en reste plus. Je crois qu'on peut rentrer.

Elle ramassa son sac et s'apprêtait à quitter le potager dégnomisé mais remarqua que le Serdaigle n'avait pas bougé.

Tu penses rester là, planté comme un navet? Allons plutôt dire au prof qu'on a fini...

Merlin seul saura quelle folle impulsion la fit s'approcher du garçon et le regarder, condescendante.

Tu sais, Carter, tu as un problème...tu n'as pas la moindre idée de comment embrasser...et ça, tu ne vas pas le trouver dans les livres...

Sans lui donner le temps de réagir, elle l'empoigna par la cravate de l'uniforme et l'attirant vers elle, posa ses lèvres sur les siennes. Sans être une séductrice née, Isela s'y prenait beaucoup mieux que lui. Leurs bouches s'accordèrent spontanément et ce qui avait voulu être sarcasme se mua en un échange plutôt chaleureux et très plaisant...qu'elle se chargea de rompre en s'écartant brusquement et le dévisageant, les yeux étincelants.

Si tu dis une parole de ça à quiconque...je te fais la peau, Carter!

Et elle s'éloigna à grandes enjambées énergiques...

Qu’est-ce qui lui avait pris de faire ça ? Lui-même l’ignorait et n’en revenait pas. Au moins ne se prit-il pas un poing dans la figure pour son incroyable audace. Calmée de ses fureurs (déjà ça de gagné) la Mexicaine n’en perdit pas sa langue pour si peu.

Tu as une drôle de façon de t'y prendre, avec les filles...Carter, soit...j'admets t'avoir provoqué...mais tu ne rends pas les choses faciles, non plus, avec tes airs de petit malin au retour de tout...tu es agaçant.

*Agaçant ? c’est bien la première fois que l’on me dit ça.*

Ça te va comme ça, M. Je Fais Tout à la Perfection?

*Je fais pas tout à la perfection…*

Tu sais, Carter, tu as un problème...

*Toi…*

tu n'as pas la moindre idée de comment embrasser...

*M’en fous*

et ça, tu ne vas pas le trouver dans les livres...

Pas dans ceux que je lis, non. D’ailleurs…

Il n’eut pas l’occasion de terminer sa phrase. Miss De La Vega se transforma soudain en instructrice très… experte. Pour Adam, n’importe qui aurait été expert vu qu’il n’avait jamais embrassé, ni été embrassé par qui que ce soit. La découverte de cette pratique, fréquemment entrevue dans les couloirs ou au parc de Poudlard, le scia quelque peu. C’était beaucoup plus doux que ce qu’il imaginait et engendrait des sensations étranges, loin d’être désagréables. L’instant de paix ne dura pas. Déjà Isela redevenait guerrière et le menaçait de lui faire la peau s’il parlait de ça à quelqu’un.
Rapide, il lui emboîta le pas :

Ne crois-tu pas présomptueux d’imaginer que quelqu’un pourrait s’intéresser à… un simple baiser ? Enfin, je parle surtout pour moi… Je ne cafterai pas ; ce n’est pas mon genre* et personne à qui raconter ça au risque de le faire mourir de rire*
Tu ne m’en as pas laissé l’occasion mais je tenais aussi à m’excuser pour mon inconduite. Je suis pas un bagarreur ni un Mr je-sais-tout, détrompe-toi. Je suis très fatigué, c’est tout.
*Et ça va pas s’arranger avec le temps perdu à dégnomer…*

Au rythme où ils allèrent, ils purent bientôt retourner au cachot avertir le professeur que la mission était accomplie. Plus aucune trace de carnage ne subsistait, ce qui rassura Adam. Pas longtemps…

Fini ? Vous croyez vous en tirer à si bon compte ? Vous êtes dans l’erreur. Demain, deux heures de colle à l’infirmerie ! Après-demain, deux heures à classer des fiches sous la surveillance de Rusard.

Toute la semaine allait y passer. Carter se décomposa :

Je dois étudier, j’ai…

10 points de moins pour Serdaigle ! On ne réplique pas ! Vous auriez dû y songer avant.

Quelle catastrophe ! Un poids énorme s’abattit sur ses épaules. C’était l’heure du repas dans la grande salle, Adam n’avait pas faim. Il aurait pu apostropher vertement celle à qui il devait (en partie) ce traitement de faveur mais s’abstint.
Ils remontèrent dans le hall, Adam grimaça un sourire très contraint :

Bon appétit. Je file rattraper le temps perdu, et…

Miss De la Vega n’était pas du même avis ( contraire aurait été étonnant)…

Finie la corvée au potager avec interlude guerrier et autres variétés, ils avaient repris une attitude civilisée pour se présenter face au professeur. S'ils avaient crû s'en tirer si simplement, la désillusion fut grande.

*C'est du sadisme!*

Encore deux colles de plus à faire avec le Serdaigle? De quoi perdre la bonne humeur pour un bon moment! Mais si elle en était fâchée, lui avait un air consterné à briser le cœur. Il pensait sûrement à ses bouquins chéris.

Allons manger...j'ai faim!

Il sourit, aussi contraint qu'un martyre chrétien face au lion qui va lui regler son compte.

Bon appétit. Je file rattraper le temps perdu, et…

Isela s'arrêta et le considéra de haut en bas avec un soupir résigné avant de le prendre du bras, sans trop de douceur quand même.

On va manger, Carter...si tu crois que je vais me ficher les colles toute seule pendant que tu gis inconscient à cause de l'inanition...détrompe toi!

Sans attendre son avis, elle l'entraîna vers la Grande Salle, sans se soucier des regards un peu surpris qu'on leur adressait.

Je dois étudier moi aussi, figure toi...tant qu'on y est et puisque tu es si savant, j'en profiterai pour que tu me donnes un coup de main...

Cette décision unilatérale ne sembla pas le ravir mais Isela s'arrangea pour lui sourire, adorable.

On se retrouve à la fin du repas, d'accord?

Et avant qu'il puisse piper mot s'éloigna, ravie vers la table des Verts et Argent.

Elle comptait tirer le meilleur parti de ce malheureux contretemps. Les examens approchaient et même sans être une fanatique des études, Isela comprenait l'importance d'avoir des notes acceptables pour en finir, d'une fois pour toutes, avec cette scolarité déjà trop longue à son avis. Si Carter était si bon élève, il pourrait sans doute lui apprendre une paire de choses intéressantes. Le pauvre, il avait l'air presque paniqué à l'idée de se retrouver à seules avec elle. Cette idée la fit sourire, maligne, tout en avalant la dernière bouchée de son dessert...Tant pis pour lui, ça lui apprendrait...

Du coin de l'œil, Isela le vit filer discrètement vers la sortie. Sans hésiter, elle quitta la table et le suivit.

Dis donc...tu voulais me planquer ou quoi???

Qu’avait-il fait à Merlin pour mériter une plaie pareille ? Non, Miss De La Vega n’entendait pas de cette oreille qu’il aille sagement étudier. Malgré ses signes de protestations évidents, il se vit entraîner dans la grande salle. Heureusement qu’elle le lâcha pour s’installer avec les Serpy de son espèce non sans avoir suggéré qu’il devait lui apprendre des trucs et l’attendre le repas fini.

*Elle peut courir*

Assez embarrassé par les regards surpris voire goguenards que certains élèves avaient levés à leur entrée en « couple », Adam prit sa place habituelle chez les bleu et bronze : le bout de table, seul. Il dénigra la nourriture pourtant succulente proposée, se contenant d’ouvrir un livre sur ses genoux. Il était tellement absorbé qu’il ne remarqua pas de suite que la tête brûlée de Paul Vance avait pris place près de lui. Les propos tenus le firent rougir puis pâlir :

Tu as du mal comprendre les ragots ! Il n’y avait rien à voir dans le potager sauf deux idiots en train d’expédier des gnomes derrière la haie.

C’est pour ça que tu es tout crotté et que tu as des griffes dans le cou ? ça doit être un bon coup, la Mexicaine !

Carter ne dit rien. Il referma simplement son bouquin et se leva, dédaigneux. Il avait complètement oublié qu’Isela veillait au grain. En un éclair, elle fondit sur lui et le rattrapa :

Dis donc, tu voulais me plaquer, ou quoi… ?

Pris de court, il sursauta à son contact tandis qu’une voix moqueuse retentissait :

Allez donc roucouler, bon amusement ! Vous aurez intérêt à noyer vos chiots.

La grande salle hurla de rire. Pourquoi fallait-il qu’en ce moment aucun prof ne soit présent ? Connaissant un peu le caractère emporté de Miss De La Véga (et pour cause) Adam retint par le bras la furie qui s’apprêtait à entrer en lice :

Arrête ! lui ordonna-t-il. Une semaine de colle ne te suffit pas ? Laisse ces idiots, ils ne méritent pas que l’on s’intéresse à eux !

Plus facile à dire qu’à faire ! Isela ruait dans les brancards mais il parvint toutefois à la forcer à quitter la salle. Pour s’engueuler, ils s’engueulèrent dans le hall :

Que voulais-tu que je fasse ? Que je dégomme ce Vance et récolte une autre retenue ? Ignorons-les, c’est mieux.

Adam n’était pas le pleutre que supposait la Mexicaine. Dans les conditions actuelles, il aurait été malvenu d’en remettre une couche, voilà tout. Elle continua à rouspéter tout au long du trajet qui menait… Au fait où allaient-ils étudier ? La bibliothèque était fermée à cette heure. Impossible d’introduire quelqu’un d’étranger dans la salle commune des Maisons. Ne restait que…

On va à la salle sur demande ! Si elle est occupée, tant pis, tu te passeras de mon aide si… gentiment souhaitée !

Pour son plus grand bonheur, la salle en question n’était pas libre. Avec un sourire satisfait Adam souhaita le bonsoir à Isela et la laissa redescendre dans le sous-sol des Serpentard.
Le lendemain, Adam se fit l’effet d’être une souris à l’affut du chat. Il n’opéra aucun déplacement sans s’être assuré que la mégère n’était pas dans le coin. Bien sûr les autres élèves ne manquèrent pas de remarquer son manège et de rire dans son dos ou même ouvertement. Certains s’enlaçaient brusquement devant lui en mimant des émois passionnés accompagnés de tirades genre « oh mon Adam, je suis ton Eve » ou de propos plus crus que vous pouvez imaginer.
L’estomac de Carter gronda souvent cette journée-là. Il avait obstinément boudé les repas de peur de tomber sur sa terreur. Vers quatre heures, il n’y tint plus et descendit aux cuisines où les elfes le sustentèrent de quoi tenir un siège. Il regretta très vite de s’être goinfré de la sorte en voyant le moment redouté arriver : celui de la colle avec Isela. Pas moyen d’y échapper, hélas. Ses entrailles remuaient bizarrement.
Lorsqu’il se présenta à l’infirmerie, elle y était déjà et aussitôt vitupéra à son encontre :

Oui, répliqua-t-il, je t’ai évitée toute la journée ; ça t’étonne ? Sachant que je devais t’avoir sur le dos maintenant et pour tes « cours »particuliers m’a paru suffisant.

L’infirmière coupa court à ce début de dispute les expédiant illico au turbin. Misère ! C’était pire que redouté. A croire que dans la journée toute l’école s’était donné rendez-vous à l’infirmerie y faire des saletés. Vider des bassines pleines de… ou de… (vous voyez le genre) Adam verdissait de minute en minute. Quelques instants plus tard, il n’y tint plus et ce fut à son tour de remplir un récipient avec les restes du repas ingurgité à la cuisine. L’infirmière le traita de petite nature, lui fila un cachet mais ne diminua pas son temps de colle.
Pâle et tremblant, Adam termina sa tâche. Peu de mots avaient été échangés avec Isela pendant cette pénible corvée. Dès que l’infirmière les y autorisa, ils filèrent sans demander leur reste. Absolument écoeuré, persuadé que les miasmes sentis le poursuivaient, Carter ne pensait qu’à une chose : prendre une douche.

Désolé mais les leçons attendront. Si tu veux, je serai dans la salle sur demande à 20 heures.

Il courut comme un dératé vers sa tour. Frais, remonté par sa douche, il gagna à pas lent la salle sur demande. Pas question d’aller manger, rien que cette évocation lui tournait le cœur. Une autre cause à ses tourments : Isela l’attendait.

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