Fraichement débarqué de son Hampshire natal, Artémidore avait rallié Pré Au Lard et ses environs depuis à peine deux semaines. A Amalthée Quedlinburg, il avait expliqué son désir ardent de changer d’air pour mieux faire le deuil de son père récemment décédé. En réalité, il s’agissait plutôt de s’affranchir des liens maternels pour prendre enfin sa place dans le cercle des Mangemorts.
Sa dévotion envers le Seigneur des Ténèbres était telle qu’il ne doutait pas un instant d’obtenir sans tarder sa considération -et même sa confiance- ainsi que celle de ses semblables maléfiques.

C’est donc avec une particulière bonne humeur qu’il entra aux Trois Balais, commanda un Whisky Pur Feu, et alla s’asseoir seul à une table tout proche.
Il y avait quelque chose de savoureux dans cette indépendance nouvelle acquise : Arté’ avait encore quantité de boutiques à découvrir, pouvait flâner dans les rues sans se soucier de quoi que ce fut, et sa mère ne pourrait plus jamais mettre son nez dans ses affaires (Tout au plus risquait-il une beuglante s’il oubliait de lui écrire régulièrement.) : Le BON-HEUR.
La maitresse des lieux fut fort longue à le servir, mais Arté’ ne lui en tint pas rigueur : Aujourd’hui, rien ne pouvait troubler son bien-être.

Il balaya la salle du regard, croisant au passage celui d’une fort jolie jeune femme aux cheveux roux, et observa longtemps un gros homme qui avait visiblement abusé de Biéraubeurre et se tenait avachis sur une chaise branlante qui menaçait de s’effondrer à tout moment. La scène le fit sourire.
Il reporta ensuite son attention à l’extérieur, où de rares sorciers erraient en direction de Zonko (chez qui Artémidore s’était promis d’aller dans la journée) ou de la Tête de Sanglier (où, là-aussi, il avait décidé de se rendre, malgré une devanture peu engageante.).

Arté’ sirota son Whisky, continuant de dévisager tel ou tel client entrant au bar, tâchant de deviner pourquoi il venait, qui il était et s’il était possible qu’il fut, comme lui, partisan du Mage Noir.
A l’évidence, aucun de ceux qui s’étaient assis au comptoir n’était Mangemort. Faisant négligemment tourner au dessus d’eux une demi-douzaine de minuscules canaris à l'aide leurs baguettes, ils discutaient de ce que les Moldus diraient si jamais ils découvraient un jour l’existence de « leur monde ».
Artémidore faillit intervenir, songeant que, pour le bien des su-cités Moldus, il serait préférable qu’une pareille situation ne se présente jamais, mais se révisa au dernier moment. Sans doute sa remarque serait mal accueillie, et il ne souhaitait pas risquer de gâcher une si belle journée en s’attirant les foudres des quatre hommes.

Sur le point de quitter les lieux pour faire quelques emplettes à Pré au Lard, Artémidore avait aperçu une jeune femme d’à peine vingt-cinq ans pénétrer dans le bar, l’air morose. Les épaules voutées, l’œil triste…A l’évidence, l’entière communauté des sorciers ne partageait pas l’allégresse qu’il éprouvait lui-même.
Sa curiosité piquée au vif, il fronça un sourcil et tâcha de deviner ce qui pouvait affecter une demoiselle esseulée, par ailleurs fort belle, et qui devait pourtant avoir toute la vie devant elle.

Comme on venait rarement noyer son chagrin dans un pub quand on avait perdu un être cher, il s’agissait sans doute d’une peine de cœur. Le beau temps revenu était effectivement propice aux rencontres, et par là même, un fléau pour les couples monogames. Les couples polygames, eux, n’avaient pas ce problème…

Il commençait un peu à s’égarer dans ses pensées lorsqu’il vit la jeune inconnue s’effondrer assez pitoyablement sur le sol, se relever avec beaucoup de dignité (ce qui était tout de même relatif, au vu de la situation gênante dans laquelle elle se trouvait) et tempêter vigoureusement contre le plus jeune des quatre sorciers accoudés au bar.
Tous les clients s’étaient tu et suivaient attentivement la suite des évènements. La patronne des Trois Balais, elle, se frappait le front avec la paume de sa main d’un air désespéré.

Il semblait que le type du comptoir l’avait fait tomber exprès, et qu’un duel était sur le point de s’engager.
Artémidore était proprement exaspéré par la grossièreté des quatre hommes, qui éclatèrent d’un rire gras en entendant la jeune fille leur proposer de se battre.
Il s’attendait à ce qu’ils déclinent sa proposition mais fut surpris de voir l’un deux se lever et se diriger tant bien que mal vers la rue, où la plupart des clients de Madame Rosmerta –qui paniquait de plus en plus- le suivirent.
Artémidore paya sa consommation et les rejoignit également, gardant une main posée sur sa baguette, sous sa cape, près à réagir si le duel dégénérait.

La demoiselle s’inclina et le grand type, titubant un peu, n’eu que le temps d’ouvrir la bouche avant d’être terrassé par un stupéfix lancé d’une main de maitre.
La victoire, sans l’ombre d’un doute, revenait à la duelliste. Aussi Artémidore se préparait-il à tourner les talons lorsque les trois compagnons du perdant brandirent leurs baguettes, près à en découdre avec la jeune femme.
Ce flagrant manque de fair-play le révolta. En gentleman, il bondit aussitôt à sa rescousse et dégaina sa baguette.

-Everte Statum ! cria-t-il avec force contre le premier qui croisa son regard.


Le combat ne serait sans doute que l’affaire de quelques secondes, tant leurs adversaires désormais communs semblaient éméchés. Un ou deux sorts relativement inoffensifs suffiraient à les faire déguerpir, pensa Artémidore.

En connaisseur, Artémidore ne pu qu’apprécier le sortilège que Stéphanie avait impeccablement lancé, et dont les effets ne se firent pas attendre : Les trois malheureux perdirent instantanément le contrôle de leurs jambes et se virent forcés d’exécuter une danse aussi frénétique que ridicule, qui dura plusieurs minutes.
Artémidore soupçonna même la jeune fille de s’en amuser beaucoup.

Décidant de ne pas s’acharner inutilement, conscient qu’ils avaient été suffisamment humiliés, Artémidore glissa sa baguette magique dans la manche de sa robe de sorcier et suivit la foule à l’intérieur.
Il resta un moment immobile, cherchant des yeux son ex-alliée. Une fois qu’il l’eu reconnu, il céda à l’envie d’aller la voir, sans raison, simplement parce qu’il n’y perdait rien, et aussi, peut-être, parce qu’elle l’intriguait.

L’accueil qu’elle lui réserva fut peu chaleureux.
Elle lui assura qu’elle aurait pu se débrouiller seule. Il hocha la tête en pensant que c’était probablement ce qu’avaient cru aussi les clients qui, par indifférence ou par lâcheté, n’avaient pas pris la peine de venir la secourir.
Avant qu’il ne réponde, elle s’était excusée de sa rudesse et lui proposait un verre…Qu’il refusa poliment : Il n’aurait pas été raisonnable de boire un second Whisky Pur Feu, et le jus de citrouille ne le tentait pas vraiment non plus.

Ainsi donc, la jeune inconnu était susceptible, indépendante et habituée des duels…La possibilité qu’elle fasse partie du Ministère de la Magie était à exclure puisque les sorciers y travaillant, tout en prétendant livrer une bataille sans merci contre le Seigneur des Ténèbres, étaient rarement « sur le terrain » pour parer aux attaques qui se multipliaient un peu partout dans le pays. C’en était presque comique.

Voyant les troubles-faits qu’elle et lui venaient de quitter réapparaitre dans le pub et marcher droit sur eux, il se dressa sur sa chaise, le regard dur, prêt, cette fois, à leur donner une bonne leçon…Ce ne fut pas nécessaire. Ils s’inclinèrent devant la demoiselle, dont le regard brillait d’orgueil, lui présentèrent leurs plus plates excuses et s’éclipsèrent sans demander leur reste.

Artémidore resta muet quelques instants avant d’engager la conversation.

-He bien…On peut dire que vous ne vous laissez pas faire…Remarquez, c’est tant mieux, par les temps qui courent…

De sa réponse dépendrait la suite de leur rencontre, aussi Artémidore observa-t-il attentivement la jeune fille, guettant sur son visage le moindre signe d’inquiétude…Ou de satisfaction.
Si elle se mettait à pester contre le manque d’efficacité du gouvernement pour rendre les rues plus sûres, il vaudrait mieux déguerpir au plus vite. Mais dans le cas contraire… ?

L’air détaché, il posa ensuite la première question qui lui vint à l’esprit, et qui était on-ne-peut-plus traditionnelle en cette circonstance.

-Au fait, comment vous appelez-vous ?

Un large sourire illumina le visage de la jeune femme lorsqu’elle répondit sans ciller qu’elle n’était pas du genre à raser les murs quand il y avait du grabuge. Elle semblait très lucide sur la situation et reconnaissait que désormais, quiconque ne savait pas se faire respecter d’autrui prenait le risque de voir son espérance de vie réduit à néant.
Artémidore ne put qu’approuver la justesse de ses propos…Et en conclure qu’aucun serpent sortant d’un crâne noirâtre n’était dessiné sur son bras.
Cela rendait leur entretien infiniment plus intéressant.

Elle prétendit ensuite s’appeler Stéphanie. Un prénom plutôt joli et féminin qui marquait souvent, si sa mémoire ne le trompait pas, un tempérament chevaleresque et un brin excentrique qui lui valait autant d’ennuis que de succès à celles qui le portaient.

Pour ne pas éveiller ses soupçons, Artémidore se présenta à son tour, mais seulement sous son second prénom. Il le préférait largement au premier et pensa que, même si les actions qu’il menait avec les autres Mangemorts se faisaient toujours masquées, garantissant l’anonymat, il était plus sage de garder pour lui son entière identité.

-Moi, c’est Siniestro. Pour vous servir.

Il fit mine de faire la révérence en souriant et reprit d’une voix douce :

-Vous êtes prudente, de ne pas me révéler votre nom de famille, mademoiselle.

Artémidore se souvint d’un conseil semblable inscrit dans les brochures préventives que le ministère distribuait sans relâche.

-Après tout, c’est vrai que vous ignorez qui je suis. Et peut-être ai-je en face de moi une fidèle de Vous-Savez-Qui. Il faut faire attention.

S’il gardait un visage impassible, il n’éprouvait pas moins une excitation extraordinaire à tromper ainsi son interlocutrice.

-Quand on voit ce qui arrive parfois à des sorciers très gentils, très serviables, et qui n’avaient rien demandé à personne….Ca fait froid dans le dos, pas vrai ?

Soupirant tristement, il ajouta :

-Bon, j’arrête de vous embarrasser, avec mes histoires.

[Hs : Hm je ne pense pas qu'elle puisse deviner qui il est ainsi : tous les sorciers, hormis certains membres de l’Ordre, détestent prononcer le nom de Voldemort et l'appellent "Tu-sais-qui", non ? Les Mangemorts l’appellent « le Seigneur des Ténèbres ».]

A son grand déplaisir, Stéphanie se montra tout à coup suspicieuse : son rire était glacial, insolent.

« Vous savez, très cher, je pense savoir ce que vous êtes. »

Ces derniers mots résonnèrent étrangement aux oreilles d’Artémidore, qui tressaillit. Il lui sembla qu’un Magyar à pointes s’était éveillé sous sa poitrine et lui brûlait cruellement les entrailles.
Avec une surprise qui n'était pas feinte, il s'exclama :

-Pardon ? Qu'est-ce qui vous permet de dire une telle chose ?

Une ombre passa dans son regard alors qu’elle continuait à parler avec témérité.
Se pouvait-il qu’elle ait vraiment deviné à qui elle avait à faire ? Si oui, il restait persuadé que rien n’avait pu le trahir…Croyant abuser de la naïveté d’une inoffensive demoiselle en détresse, s’était-il à son tour laissé prendre au piège ? Une Auror se tenait-elle en face de lui ?

Il jeta un regard en biais Stéphanie, qui le fixait elle aussi avec une satisfaction non-dissimulée. L’impression d’être un petit garçon pris en faute était intenable, humiliante, et rendit Artémidore fou de rage.

La main que la jeune femme avait glissée vers sa baguette ne lui échappa pas.
C’est alors qu’il prit conscience du poids des menaces magiques : Lorsqu’un Moldu dressait le point, le danger était aussitôt identifiable, compréhensible. Par contre, quand un sorcier brandissait sa baguette, on ignorait presque toujours quel sortilège il s’apprêtait à lancer. Le péril n’en était que plus grand, et plus redouté.

Artémidore eut cependant assez de bon sens pour ne pas s’emparer également de sa baguette, et posa ses mains bien en vue sur la table, dans une volonté évidente de montrer qu’il n’avait pas d’intentions hostiles.

Il ne pu réprimer un mouvement de recul lorsqu’elle prononça le nom de Voldemort. La jugeant indigne d’en user si librement, et outré qu’elle ose insulter son maître, il eut une grimace à la fois réprobatrice et haineuse.

Cette idiote était bien crédule de croire à la mort prochaine du Seigneur des Ténèbres, et elle ignorait sans doute ce qu’il en coûtait de parler de lui ainsi. S’il ne pouvait le lui faire payer tout de suite, ça n’était que partie remise : L’essentiel restait de se tirer de ce mauvais pas en homme libre.

Pensant que la jeune femme n’avait aucune preuve tangible de ce qu’elle avançait, il secoua la tête d’un air navré.

-Vous vous méprenez totalement sur mon compte, c'est dommage...Désolé, votre paranoïa ne suffira pas à me faire accepter un duel contre vous. Non seulement parce que ce serait d’une goujaterie sans nom, mais en plus parce qu'il y a une dizaine de minutes, nous étions associés.

Se levant aussi, il ajouta sans élever la voix :

-Et ne soyez pas stupide. Même si j’avais été ce dont vous m’accusez -ce qui, soit-dit en passant, me dégoûte- vous provoquer en duel devant une foule de gens prêt à me neutraliser si je tentais de vous tuer aurait été suicidaire.

Artémidore lui tendit alors une main amicale.

-Je comprends votre méfiance, c’est normal. Je regrette simplement que ces temps troublés nous divisent au lieu de nous unirent…

Artémidore fut profondément soulagé que la jeune sorcière accepte de lui serrer la main. Son refus aurait été un affront de plus, en même temps que la preuve de son piètre talent de dissimulateur.
Il retint un soupir de contentement en la voyant baisser la tête d’un air piteux. C’était plus qu’il n’avait espéré ! L’entendant se répandre en excuses, il fit un vague geste de la main pour signifier qu’il ne lui en tenait pas rigueur. Ou presque. Enfonçant ses mains dans ses poches, il marmonna :

-C’est déjà oublié…Et d’ailleurs j’insiste : vous avez raison d’être sur vos gardes. N’importe qui aurait réagit de la même façon.

Il haussa un sourcil lorsque Stéphanie lui proposa de diner au Chaudron Baveur. Un tel retournement de situation le laissait incrédule, sinon ravi. Cependant, son audace avait des limites : jugeant qu’il avait eu son compte d’adrénaline pour les prochains jours à venir, il déclina poliment son offre.

-C’aurait été avec plaisir, mais des amis m’attendent, ce soir.

Artémidore fut terriblement frustré d’apprendre que Stéphanie quitterait bientôt la région : Il laissait ainsi s’échapper un superbe trophée attendu de son maître et risquait de ne jamais en retrouver la trace.
Songeant à l’interroger sur sa destination, il décida finalement de ne pas tenter le Diable : Plus vite la sorcière prendrait le large, et plus vite il retrouverait sa tranquillité.
D’une voix un peu grinçante, il acheva :

-He bien…Dans ce cas, adieu. Et faites attention à vous, surtout.

Artémidore espéra sincèrement qu'elle n'ait pas perçu le double sens de ce simple conseil. Il se pencha avec élégance, lui fit un baisemain et se redressa vivement, un étrange sourire aux lèvres. Jamais il n’aurait cru pouvoir aller si loin dans l’hypocrisie. C’était beaucoup plus facile qu’il ne l’avait imaginé. Plus facile, et plus dégradant aussi.

Lorsqu'elle proposa à l'homme de venir dîner avec le soir venu il refusa, car des amis l'attendait, mince, elle aurait bien voulu en savoir d'avantage sur lui et peut-être découvrir qu'il était bien mangemort car elle le sentait, mais elle fit semblant de ne pas s'intéresser un peu plus à lui. Puis elle lui dit qu'elle ne le reverrait pas de sitôt car elle devait s'en aller il dit sur un ton poli :

Hé bien…Dans ce cas, adieu. Et faites attention à vous, surtout.

En plus il s'inquiétait pour elle, à moins que sa phrase est un double sens, il se baissa lui prit la main et l'embrassa doucement, bon pour le duel ce serait sans doute pour une autre fois, elle allait de toute façon tout faire pour découvrir qui il était vraiment et si l cachait quelque chose.

Merci de votre sollicitude, je fais toujours très attention avec qui je discute et surtout je sais parfaitement me défendre, par contre vous aussi faites attention, on ne sait jamais sur qui on peut tomber au coin d'une rue.......

Elle parlait bien d'elle car si elle découvrait qu'il était bien ce qu'elle pensait qu'il était, il valait mieux qu'il fasse attention, car elle le laisserait partir que pour l'autre monde.
Bon venant d'une ancienne médicomage c'était surprenant qu'elle pense une chose pareil ou qu'elle le fasse même mais la guerre était telle qu'il fallait bien se défendre, même si elle guérissait les autres elle était sans pitié pour les meurtriers.

Avant de tourner les talons elle le regarda encore une fois et dit :

Je suis sûr que vos amis ne seraient pas déçu de dîner avec une charment femme comme moi, demandez leur de se joindre à nous, je voudrai vous connaitre un peu plus et puis plus on est de fou et plus on rit......

Mais qu'avait elle dit là, elle était vraiment devenue folle, oui c'était ça, elle n'avait pas froid aux yeux et que la mort ne lui faisait pas peur du tout. Attendant de voir la réaction de l'homme elle patienta un instant, elle savait qu'une telle proposition ne se refuserait pas deux fois..