Shannon ne venait pas très souvent a la Tête de Sanglier. Préférant surement l’ambiance chaleureuse des Trois Balais. Mais il fallait avouer que l’ambiance n’était pas mauvaise non plus, du coté de ce bar ci. L’idée d’y aller il vint comme ca, en fin de matinée, alors qu’il préparait sa petite nièce, qui était devenue sa fille, a partir avec ses grands parents, qui devaient prendre soin d’elle ce jour la. Son groupe se produisait dans une grande salle le soir même et il avait vraiment besoin de décompresser. Le jeune homme s’habilla tranquillement, tout en noir, puis rejoint Pré-Au-Lard. La foule était dense, car l’on était Samedi matin, mais ca ne l’empêcha pas de rejoindre le bar d’Abel.

Il y avait quelques femmes présentes, et toutes se retournèrent sur son passage. Le jeune chanteur ne se rendait pas compte de son pouvoir de séduction. Il était d’une beauté pure, disaient t’on. Avec cheveux noirs légèrement méchés de rouges, sa forme de visage parfaitement ciselée, son sourire si blanc qui montrait qu’il prenait tout de même soin de lui, et ses grands yeux bleus électriques, dotés de cils tout aussi bruns que ses cheveux, qui lui avaient valu la jalousie de beaucoup.

-Une bière-au-beurre s’il-te-plait.

Abel s’exécuta et quelques minutes plus tard le jeune homme était assis a une table dans le fond du bar. Il regardait avec insistance une vieille femme qui lui était vraiment familière. C’était son professeur de Divination…Ce fut plus fort que lui, il se leva et s’approcha d’elle.

-Hum…Bonjour Madame…Vous vous souvenez de moi ? Shannon ? J’étais votre élève l’année passée.

La question du jeune homme ramena tout à fait Sibylle à la réalité. Oh oui ! Elle se souvenait de lui. Comment oublier l’élève le plus doué des classes qu’elle tenait depuis des années. Elle lui sourit en lui désignant le siège en face d’elle.

Shannon Leto ! Pour une surprise ! Je le savais en buvant mon thé ce matin, il y avait des bulles sur les feuilles ce qui, vous vous en souvenez, prédit une surprise dans la journée.
Asseyez-vous, je serai ravie de discuter avec vous.

Ravie… le mot dépassait sans doute les pensées du professeur qui, si elle voulait être franche, avait un peu peur de ce joli garçon aux dons nettement supérieurs aux siens. Il avait développé une espèce de « télépathie » assez exceptionnelle, aussi s’empressa-t-elle de murer son propre esprit. Elle n’avait pas grand-chose à cacher mais c’est toujours désagréable de savoir que quelqu’un peut fouiller votre cerveau.

Il avait toujours beaucoup appréciée son professeur, il avait toujours un peu l'impression qu'elle le comprenait plus que personne, et lui ne la considérait pas du tout comme une folle, au contraire. Il s'assit donc en face d'elle, lorsqu'elle le lui proposa, et ses grands yeux bleus semblèrent pétiller un peu plus.

-Oh que oui je m'en souviens. Comment allez vous ?

Elle n'avait pas du tout changé, et lui non plus. Tous les deux avaient étés des incompris, et même avec le succès international de son groupe, il ne se sentait pas moins différent des autres, a coté de la plaque. Il se souvint comme il avait aimé discuter avec son professeur. Mais elle avait été plus que cela...Un peu comme une confidente, mais le jeune homme n'avait jamais vraiment manqué d'amis.

Il était charmant ce jeune homme, pas du tout comme ce De Brent revu récemment. Avec Shannon, une sorte de « complicité » s’était établie. Lui, au moins ne riait pas d’elle dans son dos. Il savait qu’elle pouvait lever le voile du futur... parfois.
Il s’enquit de sa santé, elle sourit, mitigée, car impossible de lui mentir, il le saurait immédiatement :

Je vais comme un navire dont le mât est cassé : à la dérive. Je n’ai jamais su me remettre de l’affront cuisant imposé par cette horrible Ombrage. Et la mort de ce cher Dumbledore m’a été très cruelle. Alors… je bois trop, je l’avoue sans honte. Cela m’aide beaucoup dans mes visions.

Il est vrai qu’à partir d’une certaine dose, elle voyait double, donc deux fois mieux.

Mais parlons plutôt de vous. Laissez-moi deviner…

Elle ferma les yeux, doigts posés sur ses tempes, concentrée :

Vous êtes célèbres, n’est-ce pas, dit-elle animée comme une gamine qui a trouvé un petit trésor.

En fait, il suffisait de lire la gazette pour être au courant, ce que Sibylle ne manquait jamais de faire. Il faut parfois user d'artifices pour pallier aux manques de clairvoyance et demeurer crédible.

Dumbledore était mort il y a un an et demi, lorsque Shannon entamait sa septième année a Serdaigle. Sa mort avait bouleversé tout le monde, mais ce fut l'arrivée de Dolores Ombrage a la direction de Poudlard, qui bouleversa Poudlard lui meme. Il avait déjà été en retenue avec elle, car il avait osé parler librement, il en gardait une marque encrée sur le dos de sa main droite.

-Je suis vraiment désolé...Mais l'alcool ne sera surement pas bénéfique pour votre santé...

Il sourit en la voyant poser ses mains sur ses tempes, tout en sachant pertinemment, que son troisième oeuil ne lui avait surement pas prédit qu'il était devenu célèbre.

-C'est exact.

Il lui confia sa main, elle en aurait pleuré tant elle était émue. Si doué… si beau… que n’avait-elle moins d’ans.

Elle ferma à nouveau les yeux, laissant son esprit dériver ( ce qu’il faisait le mieux) .

Je vois… une jeune fille dont le prénom commence par un C. Elle est très jolie et aussi très… vive.
Vous possédez des points communs, c’est merveilleux. Excuse-moi si je n’en dis pas plus, je…

Trelawney chaloupa bizarrement.

Je suis une vieille folle. Boire à jeun, c’est stupide. On va réparer ça.

Elle leva son bras faisant cliqueter tous ses bracelets :

Abel, un encas, euh... deux, s’il te plaît.

Elle reporta son attention sur son vis-à-vis dont elle tenait toujours la main, sérieuse, soudain :

Mon enfant… ta santé à toi… vas-tu bien ?

Là, Sibylle était inquiète.

C'était impressionnant comme Sybille pouvait lire comme dans un livre ouvert en Shannon, mais ca le dérangeait pas le moins du monde. Ça lui faisait du bien de pouvoir ses cauchemars a quelqu'un. Shannon avait toujours trouvé dans la dépression un refuge, et pleurer lui faisait un bien fou, d'ailleurs ses beaux yeux bleus étaient légèrement délavés par les larmes et son regard était toujours aussi délicieusement mélancolique, c'était le genre de regard qui vous donne envie de pleurer.

-Vous avez dit vrai professeur...Elle s'appelle Cynthia.

Mais sa question le coupa net dans son élan, son expression devant celle adorable d'un enfant qu'on venait de surprendre.

-Vous le savez, je n'ai jamais vraiment put me sortir de la dépression, mais ca va pour le moment, avec le groupe.

Si elle avait pu en procréer un, sûrement que Sibylle aurait sauhaité qu'il fut celui-là., cet enfant si beau, si fragile.

- Cynthia... c'est joli. Elle doit être spéciale pour te mériter. Je suis heureuse pour vous.

Elle était totalement sincère car avec Shannon, il était inutile de finasser, il savait toujours quand on mentait ou était sincère.

Tu peux te confier à moi, tu le sais. Je sens comme un doute, une crainte... tu ne dois pas avoir peur ni de la vie, ni de l'avenir que je sens radieux pour toi..

Le jeune homme repoussa doucement une de ses mèches sombres derrière son oreille et planta son magnifique regard dans les petits yeux bruns de son ancien professeur.

-Oui...Je crois que ça va...Enfin, il y a bien un doute J'ai rencontré une autre jeune femme, et j'en sais rien en faite...Je ne sais plus...Et vous savez, mon frère est mort il y a peu de temps, il m'a confié sa fille...

Il n'en revenait pas de déballer tout ça ici. Mais ça lui faisait un bien fou !

Tu t'occupes d'une enfant? sourit Sibylle, très émue.
Pour ton frère, j'ai su, je suis désolée.

Elle s'épongea rapidement les yeux avec un mouchoir apparu à point nommé.

Tu as donc des responsabilités, c'est bien. Mais l'Ordre ne te prend-il pas trop de temps?

Elle se mordit la lèvre et jeta vite un oeil alentours. Il est de ces vérités qu'il ne faut pas dévoiler ouvertement.

-Ca fait presque un an...mais j'ai toujours aussi mal. Il est mort pour une cause juste, du moins c'est ce que l'ordre s'évertue a me dire. Il releva la tête vers son mentor, ses beaux yeux bleus étaient remplis de larmes, c'était un spectacle qui émouvrait n'importe qui. Il n'ont même pas voulu me rendre son corps, d'après eux, il est mort suite a des tortures...Il n'est même pas enterré a l'heure qu'il est. Il baissa la tête, ses épaules tremblaient doucement, sa voix se brisa en mille morceaux. C'était mon frère jumeau ! C'est le seul qui m'ait jamais vraiment compris, avec vous. Ça me tue, je n'ai qu'une envie, c'est de le rejoindre...

Ca y est la tristesse qu'il s'était évertué a cacher revenait en force et les larmes brillantes du magnifique jeune homme roulèrent silencieusement sur ses joues. Puis dans un veste plein de courage, comme un enfant qui veut paraitre fort, il les essuya dans revers de manche, ce qui les étala encore plus.

-Je suis désolé...On ne devrait pas parler de cela.

La main de Sibylle se serra plus fortement sur celle de ce jeune homme désorienté.

Je comprends. Tu le sais.

Elle aussi pleurait mais s'en moquait.

Ton frère est là. Toujours près de toi. Un autre me traiterait de folle mais toi tu sais, et je puis t'assurer qu'il est là, assis juste à côté de toi. Puis-je vous mettre en communication? Il semble vouloir te dire quelque chose.

Elle le regarda intensément, sans faiblir, sans faillir. A lui de décider.

Le jeune homme inspira profondément, essayant de calmer les battements de son coeur meurtri, et les tremblements qui l'avaient saisis. Oui, il avait peur de la vie sans son frère jumeau, avec qui la relation avait été bien plus que fraternelle. Il sourit légèrement a son ancien professeur.

-Oui...Si vous le voulez...

Il ne voulait surtout pas qu'elle pleure. Lui aimait pleurer, ca le délivrait vraiment. Et puis ca lui faisait vraiment bizarre de voir celle qu'il avait toujours admiré pleurer.

Ce qui se passa ensuite sembla particulièrement confus au jeune homme qui était déjà pas mal secoué. Son ancien professeur lui prit ses deux mains, étonnamment froides par apport a celles de la femme. Celle ci ne s'en préoccupa pas, et les serre très légèrement, avant de se mettre a appeler son frère. Rien ne se passa, ensuite, enfin, d'après ce qu'il comprit. Sybille lâcha brutalement ses mains, qui retombèrent sur la table, il s'apprêta a la rassurer lorsque...

Où est le corps de Jarod ? Serait-il possible que…

Il comprenait parfaitement ce qu'elle voulait dire, mais il ne pouvait pas y croire, pas croire que Jarod l'ai laissé mourir de chagrin pendant tout ce temps, alors qu'il serait toujours vivant...

-C'est...C'est impossible....

L’effet de ses paroles ne furent pas celui escompté. Le désespoir du jeune homme semblait encore augmenté.

Qu’y aurait-il d’impossible ? murmura-t-elle pensive. Regarde Jaxon et Gabriel Lown, ils ont été séparés longtemps mais sont à nouveau réunis. Tu sais, comme moi, à quel point les gens du ministère sont… peu actifs.

Une pensée furtive s’échappa vers Ombrage, Sibylle serra les dents. Elle se détendit en chassant la perturbatrice de son esprit.

Je veux dire que tant qu’il n’y a pas de preuves formelles, on peut garder espoir. Pour Albus… hélas…

Sa voix se cassa. Elle noya sa peine dans une gorgée de Xérès mais son verre tremblait beaucoup, traduisant son trouble.

Le jeune homme se mit franchement a trembler. Qui avait il de fou las dedans, simplement le fait que la seule personne qui l'avait aidé a vivre correctement aurait fait croire pendant plus d'un an a sa mort, et prit le risque que Shannon veuille faire de meme. Seulement il ne l'avait pas fait, il y avait le groupe, Harmonie, Alisson et Cynthia, comment aurait il put faire une chose pareille ?

-Si vous dites vrai...Pourquoi ne s'est il pas manifesté ?

Il prit doucement la main de la voyante en voyant qu'elle allait craquer. Visiblement, la mort de Dumbledore l'avait touchée plus que quiconque. Il la serra et lui adressa un de ses plus beaux sourires, un sourire réconfortant.

Il hocha la tête, lentement et doucement. Bien sur qu'il ne se faisait pas de fausses illusions. De toute façon, il avait arrêté de rêver le jour ou l'on lui avait annoncé la mort tragique de Jarod. Mais tout de même, cette boule de tristesse qui lui tenaillait l'estomac était vraiment très douloureuse a supporter. Lorsqu'elle lui proposa de l'accompagner a Poudlard, il ne put empêcher ses yeux bleus de briller, et de faire un sourire tout doux. L'antre de Mlle Trelawney avait toujours été un refuge pour lui, s'apparentant a la caverne d'Ali Baba.

-Ma nièce est avec mes parents, donc personne ne m'attends a la maison. Je me ferai un plaisir de vous raccompagner.

Il se leva. Bien qu'il soit assez petit, il dominait la voyante d'une bonne tete et demie.
Il lui présenta son bras et, ils tansplanèrent devant la grande grille du château.

[Tu continues chez toi ?]

[ on continue ici, non?]

Quand il se leva pour lui offrir son bras, Sibylle se sentit encore plus minuscule qu’à l’ordinaire. Elle accepta de transplaner jusqu’aux grilles du célèbre collège. A pas lents, ils remontèrent l’allée vers la double porte d’entrée.

Ne fais pas attention aux effrontés qui nous dévisagent. J’ai appris à ne plus voir que ce que je voulais.

Elle le guida jusqu’à la tour Nord où ils durent emprunter l’escalier aux marches d’argent menant à ses appartements.

Il n’y a pas de cours aujourd’hui. Mets-toi à l’aise, je reviens.

Elle s’enfila une tite rasade d’alcool avant de revenir avec tout un attirail.

Choisis, susurra-t-elle. Cartes, thé, boule de cristal ?

Pendant qu’il réfléchissait, elle tira les rideaux et alluma plusieurs baguettes d’encens.
Le boudoir devint encore plus intime avec tous les coussins et éclairages tamisés de voilages.

Le jeune homme hocha la tête, tandis que son regard parcourait les dizaines de visages tournés vers eux . Lui aussi avait appris a faire avec, surtout que maintenant, partout ou il allait, chacun de ses faits et gestes étaient surveillés. Par la presse moldue. Il sourit a son professeur et monta les marches menant a la tour nord, avec un certain entrain.

La pièce circulaire et agréable n'avait pas du tout changé. Les fragrances de parfums en tous genres planaient continuellement, et cet endroit, avaient égayé toutes ses années de Poudlard, il avait confiance en Sybille, elle même était la seul qui soit au courant de la relation ambiguë, presque incestueuse des deux frères.

-Humm...La boule.