Les douces et chaudes effluves s’échappaient lentement de la tasse de café noir et s’élevaient dans les airs en tourbillonnant. Luna respira profondément cette douce odeur et expira dans une sorte de soupir. Elle fixait la boisson d’un air absent, son regard était perdu dans le vague et vidé de toute émotion. Elle serait dans sa main un bout de papier chiffonné. Derrière le bar, Pétunia, la blonde serveuse à l’opulente poitrine, l’observait perplexe en nettoyant un verre. Au bout d’un long moment, Luna releva la tête. Un vieil homme mal rasé à l’aspect miteux se trouvait là et regardait avidement la tasse de café à présent froid. Luna lui tendit alors le récipient avec un sourire triste, il s’en saisit et partit s’asseoir à une table au fond de la salle. La serveuse haussa un sourcil interrogateur devant ce geste, comme si cet élan de générosité lui paraissait complètement déplacé.

Luna déplia alors la lettre chiffonnée qu’elle étreignait dans son poing depuis tout à l’heure et la relut pour la énième fois de la journée. Et comme pour toutes les fois précédentes, les larmes lui montèrent aux yeux. Elle les réprima cependant, trop fière pour oser pleurer dans un lieu public, mais si on la regardait bien on pouvoir voir perle deux petites gouttes lumineuses aux coins de ses yeux. Des traces humides sur des joies et son eyeliner légèrement coulant indiquaient pourtant qu’elle avait déjà versé des torrents plus tôt dans la journée. La jeune femme saisit la lettre et la serra fort dans ma main, comme pour broyer la terrible vérité que les mots retranscrivaient, mais sans succès.

D’un geste furieux, elle laissa tomba le papier sur le comptoir et commanda à Pétunia un grand verre de whisky Pur Feu d’une voix étranglée. La serveuse, bien que possédant des capacités mentales fortement réduites dira-t-on pour ne pas être vulgaire, avait remarqué le malaise de sa cliente et avait ajouté quelques carreaux de chocolat, un met très efficace contre les coup de blues. En voyant cela, Luna esquissa un timide sourire et but quelques gorgées d’alcool. C’était toujours comme ça quand ça n’allait pas, il fallait qu’elle boive. Mais elle sentait que pour cette fois là, ça ne suffirait pas. Il fallait qu’elle parle. Il lui fallait un confident pour lui raconter sa peine.

La jeune femme sauta alors de son tabouret et se dirigea d’un pas rapide vers l’arrière cour. Elle sortit un sifflet spécial de sa poche et souffla à l’intérieur, produisant un son inaudible pour les humains mais qu’un volatile peut entendre à des kilomètres à la ronde. Quelques minutes plus tard le hibou familial des Raynid se posait sur l’épaule de Luna. Cette dernière sortit de sous son manteau un crayon et un bout de papier où elle écrivit : « Rdv chaudron baveur tout de suite. Urgent. Luna ». Puis elle donna la missive à son oiseau avec pour seule indication de destinataire Nick Melster, membre de l’Ordre du Phénix. Le hibou s’envola et Luna revint à sa place, attendant celui qu’elle venait de mander en espérant qu’il ne soit pas trop occupé pour annulé ce rendez vous…