C’est à l’instant où Artémidore poussa la porte de chez Derviche et Bang qu’il ressentit une vive brûlure sur l’avant-bras, qu’il identifia instantanément comme l’appel de son maître.
Non pas qu’il ait des tendances masochiste, mais il ne put s’empêcher de frissonner de plaisir en même temps que de douleur : Le Seigneur des Ténèbres le demandait ! le Seigneur des Ténèbres avait besoin de lui !
En un éclair, il retourna dans la rue et y transplana dans un « plop » sonore.

Atterrissant sur un sol de pierre dur, il fut rassuré d’être entier : Sa précipitation l’avait empêché de se concentrer autant qu’il le fallait, et il avait craint d’avoir perdu une jambe en route.
Epoussetant sa robe de sorcier, il leva les yeux vers Bellatrix Lestrange, enveloppée elle aussi dans une robe de velours couleur prune, sobre mais élégante. Il fut presque déçu de ne pas voir Voldemort en personne, mais s’inclina quand même avec déférence.

Bellatrix n’attendit pas qu’il ouvrit la bouche, ne lui proposa pas non plus de s’asseoir : Elle était fébrile et parlait vite, en remuant à peine les lèvres : Elle lui ordonna de se rendre en plein cœur de Londres pour prêter main-forte à un autre Mangemort dont elle refusa de lui révéler l’identité.
Arpentant la pièce de long en large, elle ajouta qu’on avait retrouvé Harry Potter en compagnie de la fille Weasley. L'occasion était inespérée : il ne devait surtout pas rater sa chance.

N’osant demander ce qu’il devait faire des témoins Moldus, Bellatrix parut lire dans ses pensées et déclara qu’il allait de soit qu’aucun d’eux ne devait s’interposer entre lui et le garçon. Il avait donc carte blanche pour agir.
Artémidore hocha la tête, le cœur battant, et se masqua le visage avant de disparaître à nouveau.

Il réapparut à l’endroit indiqué, tout près d’une silhouette vêtue de noire qui lui était familière : L’autre Mangemort.

Autour de lui, des milliers de minuscules morceaux de verre jonchaient le sol. Les devantures des magasins étaient éventrées et vomissaient sur les trottoirs le bric-à-brac qu’elles contenaient. Une sorte de grosse radio cassée émettait une chanson qu'Artémidore ne connaissait pas, mais dont les paroles s'ancrèrent bientôt dans sa mémoire.

Une petite rouquine était étendue sur le sol, probablement victime d’un stupéfix. D’abord tenté de mettre fin au sortilège qui l’immobilisait pour lui en faire subir d’autres ô combien plus douloureux, il se ravisa en se remémorant l’objet de sa présence ici.

Harry Potter venait d’être projeté à quelques mètres de lui par un Deprimo d’une intensité à couper le souffle.

Des hurlements retentirent soudain derrière-lui. Artémidore fit volte-face en gloussant : Chez les Moldus, c’était la débandade. Une poignée d’entre eux s’étaient réfugiés derrière des conteneurs, et d’autres couraient en zigzag sur la route, se tenant la tête d’un air horrifié.
Il joua longtemps à lancer divers sortilèges informulés de bloque-jambes et autres "Hirsutus", tout en chantant avec allégresse le refrain que diffusait l'engin Moldu :

-Papillon de lumière sous les projecteurs ! Pappillon de lumière revit dans vos coeurs ! Pappillon de lumière garde tout son mystère ! Pappillon de lumière n'a plus rien d'éphémère ! Cette énergie en moi, qui brûle de partout, je ne veux que la partager avec vous !

Il avait du mal à saisir le sens profond des paroles, mais s'amusait énormément.